lundi 16 juillet 2007

Harper et ses chums au pouvoir : Votez bleu, mangez brun

Le cirque électoral a fait de nouveaux gagnants. Malgré 35% d’abstention et environ 10% des bulletins de vote annulés (un chiffre qu’Élections Canada se garde bien de rendre public), la bourgeoisie a encore une fois proclamé sa victoire. Cette fois-ci, les électeurs et électrices ont couronné le « nouveau » Parti conservateur dirigé par Stephen Harper. Heureusement, ce parti ultra-libéral aux tendances militaro-cléricales ne bénéficie pas d’une majorité en chambre. A quoi doit-on s’attendre de ce gouvernement, l’un des plus réactionnaires de l’histoire politique canadienne ?

Un appui à l’impérialisme

Après avoir pris bonne note de leur vol qualifié, les conservateurs et conservatrices comptent bien installer une relation d’amour profonde entre le Canada et les États-Unis. Pour commencer du bon pied, le président Bush a appelé Harper dès le lendemain des élections afin de le féliciter. Une fois de plus, la classe politique parlementariste s’applaudit mutuellement d’avoir usurpé le pouvoir aux populations. Il faut dire que les républicains en ont l’habitude! Les ressemblances entre les positions politiques de Georges W. Bush et celles de Stephen Harper sont nombreuses. Tous deux s‘opposent farouchement au protocole de Kyoto, au mariage gay, à l’avortement, aux syndicats. Partisan de la loi et de l’ordre, Harper n’a jamais hésité à appuyer le gouvernement américain dans ses croisades en Irak et en Afghanistan. Le programme conservateur prévoit d’ailleurs une augmentation de 5,3 milliards $ du budget des forces armées canadiennes. Qu’on se le tienne pour dit : dans ce monde de plus en plus américano-militaire, le Canada ne sera plus à la traîne.

Vous avez dit réactionnaire ?

Évidemment, Harper n’est pas le seul à promouvoir cet agenda politique à Ottawa. Un coup d’oeil sur son conseil des ministres suffit à comprendre le genre de gouvernement auquel nous aurons à faire. Comme ministre de la « justice », Harper a nommé Vic Toews, un député ontarien bien connu pour ses positions pro-Bush. Avocat de profession, ouvertement homophobe et pro-vie, Toews a un lourd passé derrière lui. En 1994, il s’oppose devant les tribunaux à une décision du gouvernement néo-démocrate de Bob Rae interdisant les manifestations des organisations anti-choix devant les cliniques d’avortement. Aujourd’hui, Toews a l’intention de faire passer l’âge du consentement aux relations sexuelles de 14 ans à 16 ans de manière complètement patriarcale et autoritaire. À quand les restrictions concernant le droit à l’avortement ou aux moyens de contraception pour les adolescentes ?

Avec le ministre de la Sécurité publique, l’ex-chef allianciste Stockwell Day, Toews proposera d’imposer des peines plus sévères aux « délinquant-e-s » et de faire en sorte que les jeunes de 14 ans accusé-e-s d’actes criminels graves voit son cas traité par une cour d’adulte. Pas assez vieux ou vieilles pour baiser, mais assez pour aller au pénitencier. Le Parti conservateur veut également passer outre le jugement de la Cour suprême concernant le mariage entre conjointEs de même sexe en tenant un autre vote au parlement. L’objectif explicite de l’exercice : rédiger une définition traditionnelle, c’est-à-dire chrétienne, du mariage dans la loi. Ce n’est pas Vic Toews qui va s’en plaindre!

Au poste de ministre de la santé, Harper a choisi de nommer un fervent admirateur de Margaret Thatcher: Tony Clement. Associé à l’aile droite du Parti conservateur ontarien (faut le faire !), Clement a occupé plusieurs postes importants dans les gouvernements de Mike Harris. C’est l’homme idéal pour réaliser le programme de son parti en matière de santé, lequel indique que la population canadienne a le droit d’avoir un « accès raisonnable » au service de santé, sans jamais parler d’un service public et universel. Selon les conservateurs, « il revient aux individus de subvenir à leurs propres besoins, à ceux de leur famille et à ceux des personnes à leur charge ». De quoi inspirer ce nouveau slogan électoral, qui pourrait résumer le programme de Harper et compagnie : « élire le parti conservateur peut mener à une mort longue, coûteuse et douloureuse! »

Deux des figures les plus à droite du gouvernement Harris se retrouvent également dans le conseil des ministres formé par Stephen Harper. Il s’agit de James Flaherty et de John Baird, respectivement nommés aux Finances et au Conseil du trésor. Rivalisant d’imagination pendant leur mandat à Queen’s Park, Flaherty a fait en sorte de d’interdire l’itinérance en Ontario (en jetant « pour leur bien » les itinérant-e-s en prison!) pendant que Baird mettait un vaste programme de « workfare » pour remettre les prestataires d’aide sociale sur le droit chemin de l’esclavage salarié, le tout assorti de tests de dépistage obligatoires pour s’assurer que les « maudits BS » ne prennent pas de drogue!

Ici, c’est Pepsi !

« Heureusement, diront certains, les élu-e-s du Parti conservateur au Québec vont permettre de modérer les ardeurs de ce gouvernement ». En tout cas, ce n’est pas sur Maxime Bernier, député de la Beauce, qu’il faudra compter. Ministre de l’industrie, Bernier est un idéologue néo-conservateur tout ce qui y a de plus détestable. Après avoir siégé sur le conseil d’administration de la Standard Life, il a rejoint les rangs de l’Institut économique de Montréal (IEDM), un think tank ultra-libéral qui rassemble les apôtres de la globalisation des marchés et de la privatisation des services publics. À l’IEDM, Bernier a publié un rapport de « recherche » faisant la promotion de la flat tax, c’est à dire d’un régime d’imposition unique pour tout le monde. Pour Bernier et ses amis, ce n’est pas juste que les riches paient plus d’impôt. Imaginez, ils risqueraient de s’appauvrir!

Agir au lieu d’élire

Comme on le sait, le parlementarisme est fondamental aux yeux de la bourgeoisie. Il permet de défendre efficacement le maintien des écarts entre les riches et les pauvres, tout en assurant à peu de frais la sauvegarde du capitalisme. En choisissant le Parti conservateur, les électeurs et les électrices ont soi-disant voté pour du « changement ». Dans les faits, seules les têtes ont changé. Le système d’exploitation, lui, reste le même. À celles et ceux qui sont dégouté-e-s par l’élection de ce gouvernement, nous disons : le vrai changement ne vient pas des urnes. Notre pouvoir est dans la rue. N’attendons pas quatre ans avant de l’exercer.


Tout en étant bien conscient-e-s des dangers qu’amènaient la venue au pouvoir des conservateurs, la NEFAC a cru bon de dénoncer la supercherie démocratique que représentent les élections. Durant la campagne électorale, deux affiches : « Votez Bien, Votez Rien! » et « Notre pouvoir est dans la rue, pas aux urnes » ont été posées dans divers endroits à travers le Québec et mises à la disposition des militant-e-s communistes libertaires sur notre site web à www.nefac.net

(Publié pour la première fois dans le numéro 9 de Cause commune, mars 2006)

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