Déception ! Il n’y a pas d’autre mot. Mardi matin, le 24 avril, les lock-outés du Journal de Québec sortaient un quotidien gratuit tiré à 40 000 exemplaires. MédiaMatin Québec, c’est le nom du journal, veut «couvrir l’ensemble de l’actualité, [avec] une place centrale aux nouvelles de la Capitale nationale». Le porte-parole syndical souligne que l’ensemble des lock-outés mettent l’épaule à la roue, très fier de son coup (il y a de quoi), il ajoutait que «grâce à cet effort collectif, nous disons aujourd’hui à la population de Québec, voici vos nouvelles locales!» Et merde...
MédiaMatin Québec c’est exactement la formule du Journal de Québec mais «en mieux». Encore plus percutant, plus sensationaliste, plus populiste, tout en couleur. C’est Sexe, sang, sport puissance 10, sans les chroniques politiques de droite imposées par la direction.
L’équipe syndicale a choisi de faire la ‘Une’ de son premier numéro avec une nouvelle ‘exclusive’. Le titre est un programme en soi : «Gangs de rue à Québec, l’ennemi numéro un». Suit un journal axé sur le fait divers (de préférence policier), l’insolite, l’économie, la culture de consommation et le sport. Pour ce premier numéro, les lockoutés se sont même payé un reportage sur les anarchistes de la coalition «Guerre à la guerre» qui préparent des «mauvais coups» pour le départ vers l’Afghanistan du contingent de Valcartier. D’après eux il y aurait entre 500 et 600 sympathisant-es libertaires dans la région de Québec (ayoye, on est hot!)… Au fil des numéros se sont rajoutés (heureusement) des textes sur la scène politique locale et provinciale.
Il faut reconnaitre que dans son genre, MédiaMatin Québec est supérieur au Journal de Québec (et de loin). La direction de Quebecor pensait peut-être faire croire au public qu’elle n’avait pas vraiment besoin de ses syndiqué-es pour sortir un journal. Les syndiqué-es, de leur côté ont fait la preuve par A + B que même sans grands moyens, leur produit est meilleur que celui de leurs patrons. En un mot, ils et elles sont essentiels au Journal. Ça, la direction de Quebecor l’a bien compris, elle qui tente d’empêcher légalement les syndiqués de produire leur canard.
N’empêche, l’événement est historique. C’est la première fois depuis 1971 que les syndiqué-es d’un grand journal tentent de sortir un quotidien parallèle. Et on aboutit à «ça»… M’enfin, ce qu’il faut surtout comprendre c’est que les journalistes du Journal de Québec sont bien contents de faire le genre de journalisme qu’ils et elles font puisque, même sans patrons, ils et elles publient le même genre de journal... Une seule nuance, à priori MédiaMatin Québec est populiste mais n’est pas à droite. Voilà peut-être la seule différence avec le «vrai» Journal de Québec.
(Publié pour la première fois dans le numéro 14 de Cause commune, mai 2007)
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