samedi 20 octobre 2007

Retour vers le futur



Le Soleil de ce matin nous apprend que Pierre-Marc Johnson pense que ça va prendre énormément d'argent pour retaper les routes et les ponts du Québec (et reprendre le retard d'entretien) et qu'il faudra trouver de nouvelles sources de revenus. On peut lire dans son rapport d'enquête sur l'effondrement du viaduc de la Concorde que «deux options viennent naturellement à l'esprit, (...) une taxe spécifique sur l'essence et l'instauration d'un système de péage sur certaines routes». En entrevue à Radio-Canada, Pierre-Marc Johnson a précisé : «Ça vaut la peine d'envisager des paiements sur les autoroutes, des tarifications spécifiques.» Bref, c'est le retour des postes de péage! (Source)

Le journaliste a raison de souligner l'ironie de la situation (Johnson était le ministre le plus influent du gouvernement qui a abolit les postes de péage dans les années 1980). Surtout qu'à l'époque, le gouvernement avait été averti qu'en abolissant le péage, il se privait de plusieurs millions de dollars «qu'il pouvait auparavant investir dans l'entretien de son réseau d'autoroutes à péage» (69M$ dès la première année selon les calculs de l'époque).

Je ne peux m'empêcher de faire le lien avec les baisses d'impôts qu'on annonce année après année. Il me semble qu'un moment donné, ça va nous pêter dans la face! On ne peut pas toujours faire plus avec moins. Il y a des «missions de base» dont l'État ne pourra tout simplement pas se départir. Tôt où tard quelqu'un va nous remettre une facture, comme c'est le cas présentement avec les infrastructures!

* * *



Certains écolos trippent sur les postes de péages, convaincu que ça réduira l'utilisation de l'automobile et que, de toute façon, c'est aux automobilistes de payer. L'ennui c'est que la tarification est porteuse d'injustice sociale. Ceux et celles qui ont du fric pourront circuler à leur guise, les autres seront limités et/ou angoissés à l'idée de se faire prendre à passer sans payer. L'avantage de l'impôt par rapport aux tarifs, c'est qu'il tient compte de la capacité de payer. (remarquez qu'il est tout de même honteux que l'utilisation des routes soit «gratuite» alors qu'il faut payer pour utiliser le transport en commun et aller à l'école...)

Selon Louis, de Un homme en colère, la technologie permet maintenant d'installer des péages « intelligent » qui ne ralentissent pas la circulation et envoient plutôt des factures à domicile en fonction de l'utilisation, de la distance, du type de véhicule et du revenu. Ça serait même appliqué dans certains pays scandinaves. Tant qu'à revenir au péage, aussi bien que ce soit ce type de péage là. Ce serait également l'occasion d'enfin faire payer sa juste part à l'industrie du camionnage, principale responsable de l'état lamentable de nos routes (et tant mieux si l'augmentation des frais encourage les compagnies à mieux utiliser le train et le cabotage).

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Nicolas, au-delà de l'injustice fiscale qui découlerait de la réinstauration de postes de péages (que tu as bien souligné d'ailleurs), il y aura fort probablement quelque chose de très malheureux qui va se produire: à cause des PPP (partenariats publics-privés), les postes de péages seront autant de moyens d'enrichir les riches et d'appauvrir la chose publique et les pauvres du coup.

Ma prédiction: (1) le gouvernement va compléter les appels d'offres avant de lever les pattes -- et lier le gouvernement suivant, peu importe sa couleur; (2) le gouvernement va tenter de se faire réélire en faisant cracher à son violon réthorique l'air qui suit "le privé finance le rattrapage dans l'entretien des routes, regardez comme le privé est bon, c'est comme du bonbon hi-han-ca-hin-ca-han ;-)"; (3) oups! ma boule de crystal vient de tomber en panne -- je ne sais pas s'il est réélu; et (4) invariablement, le privé empoche son "retour sur l'investissement".

Il y a fort à parier qu'on n'aura pas à attendre trop longtemps avant de voir le projet de loi par lequel ce monopole sera créé, et par lequel les citoyens seront tenus de contribuer à fournir le "retour sur l'investissement", bien au-delà du "cost" de l'asphalte...

Nicolas a dit…

Une chronique intéressante sur le sujet

Extrait:

"(...)L'argument selon lequel la fiscalité est plus juste que le péage se discute. Quand un camion américain, ontarien ou terre-neuvien utilise nos routes sans rien payer, est-ce vraiment juste? À cet argument s'en ajoute un autre: la solidarité par l'impôt comporte un risque, celui de la déresponsabilisation. À mon sens, il est juste et bon que l'usager assume les conséquences de ses actes. Et prenne conscience que nous vivons au 21e siècle. Nous sommes condamnés à revoir notre modèle de déplacements. L'État n'a plus les moyens de financer l'entretien et le développement du réseau routier; la congestion automobile ne cesse de croître et la pollution demeure encore trop élevée malgré les améliorations de nos véhicules et la sécurité de nos déplacements est menacée. La route libre et gratuite est dans le contexte actuel impossible."

Anonyme a dit…

Éric Lefrançois, du journal "La Presse" note: "(1) Selon un sondage récent de l'Institut Économique de Montréal". Le même institut qui signait, le 30 août dernier, un document intitulé “Privatiser Hydro-Québec pour mieux valoriser notre «or bleu»”, suivi de conférences sur le même thème (http://www.iedm.org/main/show_editorials_en.php?editorials_id=559).

L'argument qu'avance le Parti Libéral, c'est de faire payer les utilisateurs, et de faire croire à tous que c'est une bonne chose de le faire parce que "les étrangers sont sur nos routes". Hopla! On vient de bipolariser notre monde sur un axe où il y a nous (pauvres et riches confondus) et "l'étrange".

Dans le 48% (en admettant un instant les chiffres proposés par l'Institut économique de Montréal -- le même qui était derrière l'étude présentée à la Cour suprême du Canada dans "Chaoulli" -- système de santé à deux vitesses), il y a ben du monde qui va s'appauvrir à cause du caractère régressif de cette mesure fiscale. "le Québec souffre déjà d'une fiscalité très élevée"... Ah oui? Le péage, c'est encore de la fiscalité RÉGRESSIVE toutefois. (Sur la régressivité des taxes directes vs. l'impôt sur le revenu, voir: http://deactivate.wordpress.com/2007/09/27/robert-herfner-interviewe-par-fareed-zakaria-newsweek/)

"il est illusoire de croire qu'elle (L'AUTO) ne constituera plus, même à moyen terme, un pilier essentiel du rapport des citoyens à leur propre liberté de mouvement." (Éric Lefrançois -- Collabo spécial de LA Presse, chroniqueur de monvolant.ca ) Laissez-moi un instant me bercer de cette douce illusion... et arrêtez de me frapper à coup de massue médiatique, avec des chiffres bruts comme 52%, comme dans "je suis favorable, comme 52% de la population québécoise (1 -- et oui, le même (1) que dans la note qui précisait "selon l'IEDM"), au retour du péage".

Je conclus avec cette note sur monvolant.ca:

monvolant.ca est une compagnie, incorporée en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions, qui appartient à l'actionnaire majoritaire "Groupe Pages Jaunes", , à qui appartiennent une tonne de revues d'achat-vente de véhicules usagés. Peut-être que Marc P. Tellier, Christian M. Paupe et Fraçois D. Ramsay (tous trois administrateurs de monvolant.ca et de YPG Holdings) sont surtaxés... Peut-être... juste comme ça... peut-être qu'ils sont dans le 52% de l'IEDM et qu'ils bénéficieraient d'une fiscalité plus RÉGRESSIVE. Lefrançois l'écrit lui-même, "la pilule sera difficile à faire avaler". Attendez un peu, je suis sur que les grands bonzes du Parti Libéral vont trouver un peu de beurre avant l'élection pour nous aider à avaler.

Nicolas a dit…

Tu as sans doute raison. Moi je voulais juste profiter de l'occasion pour faire le parallèle avec les baisses d'impôts.