samedi 26 décembre 2009

Une décennie de lutte: 2005

À ce temps ci de l'année, tous les journaux nous gavent de bilans et autres récapitulatifs. Voix de faits ne voulant pas être en reste, nous vous proposons un rappel de la décennie, année après année, en nous concentrant sur les évènements qui ont pu être importants pour la gauche libertaire de la capitale. Aujourd'hui, nous poursuivons cette série avec 2005.

l'année 2005

(photo reprise du CMAQ)

Grève générale étudiante

C'est le 21 février 2005 que débute ce qui deviendra la plus longue et la plus large grève générale étudiante de l'histoire du Québec. Pour une rare fois, il s'agit d'une grève sur un enjeu de prêts et bourses. Un an auparavant, le gouvernement avait coupé 104 M$ dans le régime, ce qui avait pour effet d'alourdir l'endettement étudiant (en convertissant autant de bourses en prêts).

Au début, la mobilisation étudiante «traditionnelle» avait de la difficulté à lever. En effet, le gouvernement semblait inflexible et, franchement, si les syndicats n'avaient pu le faire bouger, qui donc le pourrait? Paradoxalement, c'est cette inflexibilité qui a rendu crédible la perspective d'une grève générale mise de l'avant par la gauche étudiante regroupée autour de la jeune Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSÉ).

Au printemps, quand les associations ont commencé à tomber en grève une à une, ce fut rapidement une déferlante qui a fini par toucher quelques 185 000 étudiantEs. La différence de cette grève par rapport aux précédentes, c'est que ce fut essentiellement une grève universitaire, ce qui est excessivement rare. Ce qui s'est passé c'est que les militantEs ont contourné les difficultés habituelles liées à l'immobilisme des grandes fédérations (où les facultés de droite ont un poids démesuré) pour se tourner plutôt vers les associations facultaires ou départementales. Aussi, alors que les universitaires sont habituellement perméables au discours sur «l'étudiant privilégié», cette fois le gouvernement s'attaquait directement à un des (rares) éléments de justice sociale du système d'éducation, les prêts et bourses, celui qui rend justement acceptable toutes les autres attaques contre l'accessibilité. Cela explique sans doute le fait que même des facultés aussi à droite que Médecine ont pu faire grève, ne serait-ce qu'une journée.

Dans la région de Québec, la mobilisation fut tardive. En effet, dans un premier temps les étudiants des Cegeps refusent majoritairement la grève (entre autre sur les bons conseils d'animateurs de radio poubelle). Finalement, c'est l'Université Laval qui embarque le 10 mars (les premiers furent 650 étudiantEs des départements de sociologie, d'anthropologie, d'histoire et de théâtre). En tout, 18 000 étudiantEs de Laval feront grève au moins une journée. Notons que les universitaires du campus de Sainte-Foy avaient été (presque) complètement absentEs lors des grèves des deux décennies précédentes.

Autre nouveauté, pour la première fois de son histoire la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) s'est comportée en centrale syndicale. Non seulement a-t-elle finalement appelé ses membres à la grève mais en plus elle a soumis l'entente qu'elle avait négocié avec le gouvernement aux assemblées de grévistes (deux premières!).

Sur les 185 000 étudiants ayant participé au mouvement de grève générale illimitée, 110 000 voteront contre l'entente, alors que 75 000 l'accepteront.La majorité des associations membres de la FECQ et de la FEUQ a cependant accepté l'entente de principe, d'où l'arrêt rapide de leurs moyens de pression, alors que bon nombre d'associations membres de la CASSÉÉ --le pôle de gauche, non-reconnu par le gouvernement mais majoritaire chez les grévistes-- poursuivirent la grève jusqu'au 14 avril. Notons que certaines associations étudiantes rejetteront l'entente, tout en votant contre la poursuite de la grève. Les dirigeants de la CASSÉE ont proposé, en fin de grève, un repli stratégique, repli dont ils se relèveront jamais.

Cette grève est importante parce que, malgré tout, c'est une victoire (le gouvernement a reculé... même s'il n'a jamais remboursé les sommes économisées pendant le temps où la coupure a eu cours). Symboliquement c'est important. Deuxièmement, c'est la plus importante grève étudiante de l'histoire du Québec, ce qui n'est pas rien, et c'est le retour dans le décors d'une perspective clairement syndicale dans le mouvement étudiant.

==> L'article (très complet) de Wikipedia sur la grève étudiante
==> Rétrospective de la grève à l'Université Laval (avec une perspective assez représentative de la majorité des étudiantEs libertaires à l'époque)

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Défaite des grévistes de la SAQ.

Le 8 février 2005, après 3 mois de grève, se termine un important conflit à la SAQ. Comme le syndicat avait fait de son combat un combat social, contre la précarité, les libertaires s'étaient impliqués dans de nombreuses actions de solidarité. La solidarité du public ne fut toutefois pas au rendez-vous, les gens se sont approvisionné en masse dans la poignée de succursales maintenues ouvertes par des cadres, pas plus que l'action industrielle décisive (par exemple, le blocage d'entrepôts). C'est une défaite pour les syndiquéEs dans une grève qui eut un important retentissement médiatique. C'est important parce que c'est aussi une défaite pour un certain syndicalisme de combat qui aurait pu être un tremplin pour l'organisation de précaires dans d'autres secteurs du commerce. Au contraire, cela eu l'effet d'une douche froide.

==> Post Mortem de la grève à la SAQ

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La montée de la droite

L'autre évènement important de 2005 c'est la montée de la droite. Il y avait eu d'abord l'affirmation d'une base de masse pour la droite populiste (on peut penser aux manifs monstres pour sauver CHOIX Radio X à l'été 2004 ou au mouvement autour de l'enquête sur la prostitution juvénile (Scorpion). En 2005, cette base de masse est devenue une base électorale assurant coup sur coup l'élection de la mairesse André Boucher, des députés conservateurs et d'André Arthur. Ces résultats électoraux de la droite dure, unique à Québec à ce moment là, vont porter un dur coup à la gauche sociale et politique. Pour faire une histoire courte, c'est la débandade...

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