mardi 22 décembre 2009

Une décennie de lutte: 2002

À ce temps ci de l'année, tous les journaux nous gavent de bilans et autres récapitulatifs. Voix de faits ne voulant pas être en reste, nous vous proposons un rappel de la décennie, année après année, en nous concentrant sur les évènements qui ont pu être importants pour la gauche libertaire de la capitale. Aujourd'hui, nous poursuivons cette série avec 2002.

l'année 2002


17 mai au 20 septembre: le Squat du 920 de la Chevrotière



(Photo de Neonyme)


Le 17 mai 2002, au terme d'une semaine nationale d'actions organisée par le FRAPRU, quelque 200 personnes mobilisées par le Comité populaire Saint-Jean-Baptiste prennent d'assaut une maison laissée à l'abandon par son propriétaire (la Ville de Québec!). C'est le début du squat du 920 de la Chevrotière.

À l'époque, les groupes communautaires anticipaient une sévère crise du logement puisque le nombre de logement disponibles dans plusieurs villes frôlait le zéro. C'est pour faire monter la pression d'un cran qu'une semaine nationale d'occupations avait été adoptée dans la foulée du Sommet des Amériques et du squat d'Overdale lors du congrès de juin 2001 du FRAPRU. La plupart des actions furent des occupations de terrains et de bâtiments désaffectés qui duraient de quelques heures à quelques jours au gros maximum. Mais pas à Québec... Dans Saint-Jean-Baptiste, l'immeuble choisi était situé sur un terrain hautement symbolique, l'Îlot Berthelot, et appartenait de plus à la Ville. Toutefois, personne ne s'attendait à rester aussi longtemps.

Voyant que l'occupation durait, le Comité populaire a transféré à l'assemblée des occupantEs le pouvoir décisionnel sur l'action. Comme l'expliquait un article sur les cinq ans du squat dans le journal l'Infobourg: «C’est tout naturellement que les occupants-es, toujours entre 10 et 30 personnes à la fois, se sont peu à peu approprié le contenu et la forme de l’action et l’ont d’abord transformée en occupation «ouverte», puis en squat politique autogéré.»

C'est suite à la trahison d'une partie du mouvement communautaire, des représentants de la Fédération régionale des coopératives d'habitation de Québec Chaudière-Appalaches sont allés négocier sans mandat un compromis avec la Ville (un projet mixte coop-condos), que l'expulsion du squat par la police eut lieu quatre mois plus tard. Le moins que l'on puisse dire c'est que l'expérience a laissé un goût amer à plusieurs personnes.

Le squat du 920 de la Chevrotière fut important et marquant pour un certain nombre de raisons. Premièrement, c'était l'action directe qui entrait par la grande porte dans le mouvement communautaire. Les libertaires et les radicaux présentEs dans certains groupes depuis un moment déjà passaient aux actes avec succès (avec l'appui moral et financier d'un nombre considérable d'organismes sociaux divers). Deuxièmement, pour plusieurs libertaires issus des mouvements antimondialisation ou étudiant, cette action a marqué le passage vers un militantisme plus ancrés dans les quartiers et les luttes sociales.

Mais le squat fut également un laboratoire de pratiques sociales et d'alternatives. Il a été vécu très intensément par toutes les personnes qui y ont participé activement. Au même titre que le Sommet des Amériques, ce fut le moment d'un rebrassage de cartes intenses au niveau militant et de nombreux groupes sont apparus dans la foulée (on peut penser au collectif «des bas quartiers» ou à «Dada a faim»).

Ironie de l'histoire, la défaite des squatters ne fut que temporaire. En effet, le promoteurs de condos c'est finalement cassé la gueule. Aujourd'hui, après tout de même quatre ans de nouvelles luttes, c'est un chantier «100% coop» qui a cours sur l'Îlot Berthelot... Comme le revendiquait les occupantEs de 2002!

==> Une archive de photos et d'articles concernant le 920 de la Chevrotière

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L'infoshop La Page Noire


Le squat du 920 de la Chevrotière a été une pépinière de projets alternatifs. L'un d'eux, et non le moindre, se poursuit encore: la Page noire. En effet, l'infoshop de Québec a vu le jour dans le sous-sol du squat à l'été 2002. Depuis, elle a connu de nombreux locaux, dans Saint-Roch et Limoilou, mais continue son petit bonhomme de chemin. On le réalise rarement mais le maintien d'une «librairie sociale autogérée» à Québec est tout un exploit. En effet, il faut remonter aux années 1970 pour retrouver la dernière librairie alternative de gauche à Québec.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Une petite coquille: "Premièrement, c'était l'action directe qui entrait pas la grande porte dans le mouvement communautaire"

Nicolas a dit…

Oups. Merci.