vendredi 18 décembre 2009

Révolutionnaires du Nouveau Monde

Une brève histoire du mouvement socialiste francophone aux États-Unis (1885-1922)

Lux Éditeur poursuit sur sa lancée d’histoire sociale avec ce petit livre de l’historien Michel Cordillot. Si l’histoire du mouvement ouvrier et socialiste américain est relativement connue, personne jusqu’à maintenant ne s’était arrêtée au rôle joué par l’immigration française. Et pourtant...

Dès 1885, dans les communautés minières de Pennsylvanie, un vigoureux mouvement socialiste francophone va voir le jour. La vie de ce mouvement est structurée autour d’une série de journaux, comme La Torpille, Le Réveil des masses, suivis du Réveil des mineurs et de la Tribune libre, et enfin l’Union des travailleurs. D’abord d’obédience anarchiste, le mouvement va devenir socialiste libertaire puis socialiste tout court au fur et à mesure de son américanisation. Son ancrage et sa permanence tiennent au fait que le mouvement des immigrés politisés organise littéralement la vie de l’ensemble de la communauté immigrée, notamment en publiant en français une presse dont les pages sont largement ouvertes à tous (jusqu’à un quart du matériel écrit fourni par les lecteurs), en organisant une foule de syndicats, de coopératives, de mutuelles et d’associations sociales et culturelles francophones.

Concernant essentiellement les communautés francophones d’origine européenne, une jonction s’opère avec la masse des Canadiens français émigrés en Nouvelle-Angleterre. En effet, la Fédération française du textile des Industrial Workers of the World (syndicalistes révolutionnaires) émerge en 1906-1907 chez les Québécois exilés, ce qui rend possible un activisme socialiste dans une communauté que les Français et les Belges méprisaient jusqu’alors pour son conservatisme et son attachement au catholicisme. C’est sur les presses de l’Union des travailleurs qu’est imprimé l’Émancipation, journal de cette fédération syndicaliste libertaire.

Dans la foulée, l’éditeur de l’Union des travailleurs fait des excursions jusqu’au Canada. On le trouve ainsi en tournée à Montréal et Québec au début du siècle où il rencontre plusieurs syndicalistes influents. On retrouvera ainsi plusieurs syndicalistes montréalais dans la liste d’abonnés de l’Union des travailleurs, comme J.-A. Rodier des typographes, L. Charbonneau des boulangers, E. Pelletier, des peintres ou encore Albert Saint-Martin, l’un des organisateur du 1er mai à Montréal. Québec n’est pas en reste et compte même un agent pour gérer localement les ventes et les abonnements en la personne de L.-G. Authier, du syndicat des typographes. L’histoire ne dit pas quel impact a eu ce journal socialiste franco-américain sur le devenir du jeune mouvement socialiste québécois d’avant-guerre.

Un petit livre utile qui lève le voile sur tout un pan méconnu de l’histoire de la gauche francophone en Amérique du Nord. À lire notamment pour se rappeler que la lutte pour l’égalité économique et sociale ne date pas d’hier, ni des années 1960!

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Extrait du numéro de décembre du journal l'Infobourg.

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