dimanche 23 mars 2008
Classiques de la subversion : « Du côté des petites filles »
Dans Du côté des petites filles, l’auteure s’est occupée de femmes enceintes et a participé à la formation d’enseignantes et d’éducatrices. A partir de diverses études et de ses observations personnelles, elle décrit « l’influence des conditionnements sociaux sur la formation du rôle féminin dans la petit enfance » (le sous-titre du livre).
Quand on parle de l’éducation à être une femme, il est courant de s’entendre répondre que, déjà toutes petites, les fillettes aiment le rose et sont coquettes (ou adoptent tout autre comportement féminin).
Les deux premiers chapitres, « L’attente de l’enfant » et « La petite enfance », décrivent la force qu’il faut déployer pour transformer des êtres pleins de vie et d’enthousiasme en personnes passives ayant perdu une grande partie de leur créativité. Il est à craindre que les choses n’aient changé qu’à la marge. Les futures mères échangent des recettes pour concevoir un garçon, étudient les signes (positifs pour les garçons par exemple si la mère est de bonne humeur) pour déterminer le sexe de l’enfant à naître, premiers mots « c’est une fille », « c’est un garçon ». La chambre préparée aura un décor différent selon le sexe de l’enfant attendu.
Les attentes envers les enfant sont différentes, les comportements maternels seront différents.
Plus d’enfants mâles sont allaités, et plus longtemps. Les tétées sont plus longues pour les garçons, la mère est plus disponible, tolère les pauses, est bienveillante alors que le message passé aux filles est « dépêche-toi ». Les filles qui têtent trop avidement sont interrompues, et félicitées quand elles sont calmes, autant de fois que nécessaire pour obtenir le « bon » comportement.
L’éducation à la propreté est plus précoce pour les filles.
Pendant la petite enfance, on apprend à considérer son corps comme une chose bonne ou mauvaise, à s’aimer ou se détester. La nudité des garçonnets est valorisée, pour les fillettes c’est la pudeur qui l’est. Les premières manifestations sexuelles des garçons sont valorisées.
Jusqu’à un an les mouvements du corps, les gestes, les mimiques sont semblables pour les deux sexes. Jusqu’à deux ou trois ans, les choix de jouets sont libres. Cela va changer après une intense période de formation aux comportements autorisés. Par un jeu de refus et encouragements, les enfants apprennent quels sont les jouets permis et les réclament bientôt exclusivement.
Les comportements des fillettes sont domestiqués : se tenir mal, dire des gros mots, courir et grimper aux arbres sont déconseilles tandis qu’être gentille avec les autres enfants, être craintive, être serviable est encouragé. Les interventions parentales et éducatives sont différentes selon le sexe de l’enfant.
La partie suivante « Les institutions scolaires » a vieilli, et des études récentes sur le sexisme de l’enseignement ont été faites. La dernière partie « Jeux, jouets et littérature enfantine » n’a rien perdu de son actualité et on pourra lire Contre les jouets sexistes, édition de l’Echappée pour s’en convaincre.
La même étude pourrait être faite sur le conditionnement des petits garçons à ne pas être sensibles, tendres et affectueux. Et sur le comportement des pères.
Un livre démolarisant tant les comportements apparaissent acquis à un âge précoce mais à offrir à tous les futurs parents.
• Elena Gianini Belotti, Du côté des petites filles, Edition des Femmes. Première parution en 1974, réédité en 1994
Un texte Christine paru dans le numéro 169 (janvier 2008) du mensuel Alternative libertaire
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