L'histoire de la Deuxième guerre mondiale m'a toujours fasciné mais il y a un chapitre qui m'a toujours semblé obscur: qu'est-il arrivé avec la gauche allemande après 1933? Ou, plutôt, comment se fait-il qu'il n'y a pas eu plus de résistance de l'un des prolétariats les plus organisé et combatif du monde?
Cette incongruité, l'absence de résistance allemande, est même devenu un argument de vente des libertaires au fil des ans. Qu'on en juge: les révolutionnaires espagnols, majoritairement libertaires, ont résisté les armes à la main pendant trois ans face aux fascistes alors que les allemands, majoritairement autoritaires, ont succombé en quelques jours. Je mesure aujourd'hui combien l'argument est profondément injuste!
Le parti communiste allemand, qui regroupait dans ses organisations de masse plus d'un million de prolétaires (dont 100 000 miliciens) et obtenait jusqu'à 6 millions de voix, a bel et bien résisté au nazisme. Avant l'arrivée au pouvoir d'Hitler, les communistes ont mené une campagne contre l'implantation de locaux de la SA dans les quartiers ouvriers. En un an, la campagne a fait 79 morts nazis et 103 morts communistes. 51 communistes avaient été tué par les nazis, presque tous les autres avaient été tué par la police du gouvernement... social-démocrate. C'est la peur d'être interdit, et donc de perdre les avantages de la légalité, qui ont poussés les communistes a mettre fin à cette campagne. Cette volonté de préserver l'existence légale du parti lui a été fatale. À l'arrivée au pouvoir des nazis, les rafles ont menées toute la direction communiste, le 2/3 des cadres intermédiaires et 20 000 militantEs en prison. Soixante camps, trente quartiers spéciaux dans des prisons d'État, soixante centres de détention sont ouverts pour les accueillir.
Pourtant, les communistes n'ont pas baissé pavillon. Ils se sont réorganisé dans la clandestinité, encore et encore. Ont été présent dans les quartiers, les usines, les camps et même l'armée. Ont fourni 5 000 hommes à la République espagnole. Ont rejoint tous les maquis d'Europe. Cent fois, mille fois les réseaux communistes ont été détruits par les nazis. Des dizaines de milliers de militantEs y ont laissé leur peau. Et à chaque fois, d'autres rouges ont pris le relais. Et ce jusqu'en 1945, sans interruption notable.
Oh, bien sur, c'était des staliniens. Oh, bien sur, ils avaient l'appui d'un puissant État étranger. Et pourtant, ça force le respect. Et, surtout, ça ne mérite pas l'omerta honteuse qui sévit depuis trop longtemps. Non, les révolutionnaires allemands n'ont pas à rougir de leur passé.
C'est cette histoire que «La résistance communiste allemande 1933-1945» raconte.
T. Derbent, La résistance communiste allemande 1933-1945, éditions Aden, Bruxelles, 2008, 115 p. Ce petit livre est disponible à la Page Noire.
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