dimanche 14 mars 2010
Le PQ expulse son club de gauche (SPQ-Libre)
Le Club politique «Syndicalistes et progressistes pour un Québec libre» (SPQ-Libre) s'est fait montrer la porte en fin de semaine au P.Q. [cet article fait une bonne synthèse] C'est la fin d'une aventure pilotée par le directeur de l'Aut'Journal qui perd ainsi son pari d'arriver plus vite à faire quelque chose en squattant un grand parti qu'en militant dans un plus petit (QS). Témoignant de la main-mise de la chef sur le P.Q., aucun des appuis du SPQ-Libre dans l'aile parlementaire n'a levé le petit doigt.
Flashback
L'histoire du SPQ-Libre commence à l'Aut'Journal. Cette publication «ouvrière, indépendantiste et progressiste», issue d'un obscur groupe ML aujourd'hui dissout [enfin, c'est ce qu'on comprend de la suite...], a eu un comportement politique pour le moins erratique au fil des ans. Au début des années 1990, quand Parizeau reprend les rennes du P.Q. et lui (re)donne une twist un peu plus sociale-démocrate et souverainiste, l'Aut'Journal, qui était surtout connue comme une feuille syndicaliste, se met au service du P.Q. dans la joie et l'allégresse.
La défaite référendaire et l'arrivée de Bouchard change la donne. À ce moment, la publication se replie sur les causes sociales et syndicales. Elle appuie, sans succès, la cause de jeunes étudiants [Rebello, Tadros et cie] qui veulent faire inscrire la sociale-démocratie à l'article 1 du P.Q.. Devant l'échec pattant, l'Aut'Journal se lance dans l'action politique autonome. C'est le lancement d'une grande campagne pour le scrutin proportionnel et, ensuite, l'aventure du Rassemblement pour une alternative politique (RAP). Une candidature indépendante de Paul Cliche sous cette bannière fera perdre au P.Q. la circonscription montréalaise de Mercier lors d'une élection partielle. Dans la foulée, l'Aut'Journal appui de tout coeur les candidats du RAP et d'un petit parti de gauche, le PDS, lors de l'élection générale suivante. Ce sera un flop (un tout petit peu plus de 1% à la grandeur du Québec, seul Michel Chartrand fait bonne figure face à Lucien Bouchard, au Saguenay).
De ce flop, l'Aut'Journal tire la conclusion que, sans la proportionnelle (et l'indépendance!), la gauche n'a aucune chance. Il ne sera donc pas du processus d'unité de la gauche qui préside à la fusion entre le RAP et le PDS, pour donner l'Union des forces progressistes (UFP), puis entre l'UFP et une nouvelle force montante, Option citoyenne, qui donnera Québec Solidaire.
À la place, l'Aut'Journal propose une stratégie alternative: l'entrisme ouvert dans le P.Q.. Ce sera le club politique SPQ-Libre. Au début, le SPQ-Libre, qui était vu comme une bonne chose par la direction du P.Q. puisqu'il rabattait des syndicalistes vers le parti souverainiste et endiguait l'hémorragie de militantEs vers QS [perdre Amir Khadir, un ancien candidat bloquiste, c'était déjà bien assez!]. Il y eu même quelques victoires symboliques. Des has-been syndicalistes joignent les rangs (l'ex-président de la CSN, l'ex-présidente de la CSQ, l'ex-directeur québécois des TCA... et même quelques syndicalistes encore en fonction comme le président des cols bleus de Montréal ou l'actuel directeur québécois des TCA). Le «succès» est même palpable au sein du parti. Ainsi, la première présidente du SPQ-Libre (Monique Richard, ex de la CSQ) se fait élire à la présidence du P.Q. puis à l'assemblée nationale. Des têtes d'affiches du SPQ ont même le droit de se présenter au nom du parti dans des circonscriptions imprenables. En parallèle, des gens qui ont le «profil SPQ» se font élire à l'assemblée nationale (Curzi, ex-UDA, Girard, ex-FAECUM et ex-CSN, Rebello, ex-FEUQ, etc.).
L'ennui, c'est qu'on interdit au club d'avoir une influence réelle sur la politique du P.Q.. Et même quand les «syndicalistes et progressistes» convainquent la base d'adopter une position, la direction se donne le droit de la rejeter du revers de la main (ex.: Boisclair qui enterre l'idée de nationaliser l'éolien le lendemain de son adoption par le P.Q.!). Pire, alors que SPQ cherche à convaincre les syndicalistes de faire le saut et d'appuyer le P.Q., la direction elle, par populisme, casse du sucre sur le dos des syndicats ! Quand ce ne sont pas les soupers bien arrosés qui sont dénoncés par Boisclair, ce sont les demandes du secteur public qui sont jugées «un peu excessive» par Marois.
Malgré tout, le club persiste, publie des communiqués, fait connaître ses positions, critique la direction, etc. Et s'en est trop. La direction vient de leur montrer la porte, avec l'appui des instances, parce qu'ils refusaient de rentrer dans le rang.
La suite du monde...
La stratégie de l'Aut'Journal est un échec. Il n'y a pas de place au P.Q. pour une tendance de gauche organisée. Les syndicalistes et les militantEs des autres mouvements sociaux doivent en prendre bonne note. Le P.Q., c'est pas nos amis! S'ils veulent bien de la gauche sociale, c'est à condition qu'elle reste dans le placard. Une hypothèque sur l'autonomie des mouvements sociaux vient d'être levée. Pas sur que ça va changer grand chose sur le spin péquiste en campagne électorale mais bon. Notons tout de même que, dans un communiqué, le directeur québécois des TCA rappelait qu'il avait été le seul v.p. de la FTQ a soutenir l'idée de supporter le P.Q. lors de la dernière campagne électorale. Ça augure bien. La prochaine fois y'en aura peut-être pas du tout.
Comme disait l'autre: ne comptons que sur nos propres moyens.
Et, juste pour faire plaisir à Pierre Dubuc, «Parti Québécois, parti bourgeois!»
M-à-j: Selon cet article du Devoir, Monique Richard c'est opposée à l'expulsion du SPQ-Libre lors du débat à l'exécutif du parti. Elle a déclaré au Devoir: «Je prends acte de la décision et c'est tout. J'ai fait valoir mon point de vue au caucus et je vais arrêter cela maintenant.»
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
8 commentaires:
on s'entend, si René Lévesque se pointait de nos jours au PQ, on lui montrerait la porte.
Je ne sais pas. Lévesque ne donnait pas sa place comme chef. Il est par exemple documenté qu'il a tout fait pour empêcher le représentant de l'aile gauche de l'époque (Bourgeault) de se faire élire sous la bannière du P.Q..
Lévesque, il est tellement cité a tord et a travers qu'il doit se retourner "a spin" dans sa tombe.
Laissons la viande froide tranquille.
Ceci dit je suis déçu que ce soit la direction qui ait montré la porte au SPQ. S'ils étaient un tant soit peu lucide, ils auraient claqués la porte il y a longtemps.
D'un autre côté ça aura probablement l'effet de moins diviser le vote a gauche. Allez savoir.
En passant la photo de Marois est sublime.
Oui la photo est belle mais ça devrait être plutôt écrit : "une québecoise plus riche".
Alex
>>S'ils étaient un tant soit peu lucide
Meuh non, si ils étaient Lucides ils se prosterneraient aux pieds du génial Lucien Bouchard, pardis!
Ouain je veux pas laisser le monopole du mot lucide a une gang de nostalgiques de Duplessis.
Je suis d'accord. «Entrisme» a eu une histoire sombre de la CCF-NPD depuis plus de 70 ans, et c'est exactement comme futile dans le PQ.
Enregistrer un commentaire