jeudi 2 juillet 2009

Putsch d’État au Honduras : le retour des Gorilles ou la tactique du travail de sape ?



[via Anarkismo­]

Analyse sur les évènements du Honduras et le dilemme qu’un putsch d’État indéfendable pose à l’oligarchie du Honduras : ou s’accrocher à la stratégie des « gorilles » ou utiliser la conjoncture pour saper le réformiste Zelaya, afin de reconquérir l’hégémonie absolue dans l’espace politique. De manière égale, nous posons le dilemme auquel font face les forces qui s’opposent aujourd’hui au putsch : ou on permet que la crise se résolve par le haut, au niveau institutionnel, ce qui laisse intactes les racines du problème, ou il est mis en échec au putsch par une mobilisation populaire de masse qui, non seulement blesserait à mort l’oligarchie, mais fortifierait le peuple du Honduras dans son rôle d’acteur politique de poids.

Les sabres reluisent de nouveau dans des terres latino-américaines


Les putschs d’État et les processus de déstabilisation orchestrés depuis Washington se sont succédés dans divers pays où l’on met en oeuvre des gouvernements réformistes qui peuvent s’avérer inconfortables pour la digestion des élites hémisphériques - le Vénézuéla 2002 ; Haïti 2004 ; La Bolivie 2008. Cette fois c’est le tour du Honduras, dont le président Manuel Zelaya a été renversé par des militaires et exilé au Costa Rica. Entretemps Zelaya avait été séquestré par les militaires, et, au Congrès on lisait une lettre écrite par Zelaya (qui s’est avérée fausse) dans laquelle il renonçait à sa charge comme président. En même temps, et tandis que divers parlementaires dénonçaient la conduite présidentielle mettant en danger l’ « Etat de droit » ils l’accusaient de violations multiples et imaginaires de la Constitution, le destituaient de sa charge, laquelle était assumée par le président du Congrès, Robert Micheletti (qui, comme Zelaya, est membre du Parti Libéral).

Le putsch s’est produit le jour même où devait avoir lieu une consultation des citoyens, convoquée par Zelaya, sur la nécessité de changer la Constitution, rédigée en 1982, quand le pays sortait d’une dictature militaire - soutenue par les USA - extrêmement brutale qui avait détenu le pouvoir de 1972 à 1981. En cas de réponse favorable, une Assemblée constituante devait être convoquée en novembre.

Cette proposition a fait face à une opposition acharnée des secteurs réactionnaires de l’oligarchie hondurienne, qui contrôlent le Législatif, la Cour Suprême et l’Armée, et qui sont réunis sous la bannière incontestée de l’ultra- conservateur Parti National du Honduras. Ces secteurs s’opposent à la plus petite réforme qui peut produire la plus petite mise en question de sa domination absolue sur le Honduras. Le pouvoir Judiciaire, en coordination avec ses alliés du corps législatif, s’est empressé de déclarer le référendum inconstitutionnel ce jeudi 25 juin ; le décor pour le putsch était mis en place. Les tanks sont sortis dans les rues dimanche 28 aux premières heures en direction de la résidence de Zelaya, et par conséquent ont annulé le référendum et réglant ainsi (ou croyant régler) par la force le différend entre les pouvoirs étatiques. [1]

Qu’y a-t-il la stratégie « golpiste » ?

Le Honduras est un pays qui, comme nous le mentionnions, n’est pas étranger à l’histoire, partagée dans notre continent, des dictatures militaires, lesquelles ont occupé toute la période des années 60 et 70. Dans les années 80 cette histoire de violence de classe et de terrorisme d’État continua sous la forme d’un régime "démocratique" sous lequel a proliféré le para-militarisme, qui a couté la vie à des milliers de paysans et travailleurs honduriens, et qui a servi de plate-forme pour le terrorisme des Contras qui a dévasté le Nicaragua. Ces opérations étaient directement dirigées par John Negroponte, ambassadeur américain au Honduras. La présence américaines s’est également exprimée de manière physique par l’existence d’une base militaire des USA avec au moins 500 soldats américains sur le sol hondurien. C’est de cette dynamique politique et sociale que s’est nourri un puissant système de domination comprenant une oligarchie absolument coloniale et une armée imprégnée par la propagande sur la doctrine de sécurité nationale.

Zelaya est loin d’être un révolutionnaire : c’est un membre du Parti Libéral, qui est passé à une tendance réformiste, un peu plus à gauche que la majorité de son parti, et qui a mis en place certaines réformes sociales (y compris la nouvelle constitution). Ce qui inquiète le plus l’oligarchie hondurienne c’est l’entrée du Honduras dans l’ALBA, initiative d’intégration latino-américaine conduite par le Vénézuéla. Toutefois, comme nous l’avons indiqué à d’autres occasions, la "radicalité" d’un mouvement ou d’un politicien dirigeant ne peut pas être mesurée en termes absolus, mais doit être comprise dans son contexte : dans ce cas, la "radicalité" de Zelaya n’émane pas de sa propre politique, mais de l’opposition absolue de l’oligarchie à tout compromis ou à quelque changement que ce soit. Ce n’est pas que Zelaya soit vu comme un "radical" parce qu’il est socialiste, mais par le caractère complètement néanderthalien de l’oligarchie hondurienne. Ce paradoxe c’est ce qui a fait que la lutte pour des réformes, pourtant assez tièdes en Amérique latine, a été le fondement de luttes révolutionnaires. La stratégie putschiste , intègre ce paradoxe, pour s’opposer au réformisme dans le contexte latino-américain, qui consiste à adopter des formes de "contre- révolte" en l’absence d’un mouvement révolutionnaire et peut se résumer à ce qui suit : la nécessité de freiner tout processus de changement social, si timide soit-il. Le grand problème pour l’oligarchie est que l’époque où une dictature militaire pouvait être acceptée sans complication est révolue. Nous ne sommes plus dans les années 70 et les USA sont plus intéressés à garder des aspects démocratiques en utilisant d’autres méthodes plutôt qu’en imposant sa volonté au moyen du raccourci des coups d’État. Pour cette raison, la stratégie putschiste présente comme principal inconvénient pour cette oligarchie, qu’elle n’est pas soutenable à long terme dans le contexte du Honduras. [2]

Le scénario compliqué du post-putschisme...

==> Lire la suite de cette analyse de José Antonio Gutiérrez D. sur le portail international Anarkismo.

6 commentaires:

Louis Douglas a dit…

Zelaya n'avait qu'à être majoritaire et suivre les règles pour changer la constitution. Évidemment ça ne se fait pas d'un claquement de doigts. Il n'a rien voulu savoir, alors il est dehors, donc pas un putch.

Si vous voulez changer la constitution, vous n'avez qu'à voter massivement pour des députés qui sont pour.

Louis Douglas a dit…

Concernant votre site, au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, les pays capitalistes sont démocratiques, ça devrait vous mettre la puce à l’oreille.

La démocratie capitaliste permet entre autre de voter lorsque j’achète. Je choisi un produit qui répond à mes besoins et je signifie qu’il me plait en l’achetant, ce qui devient un signal au système productif que le produit est désiré et utile.

Comme il semble que vous ayez à coeur le travailleur, pourquoi vouloir continuer à piger de force dans ses poches pour enrégimenter le reste de la population avec des nationalisations et plans d'État par exemple?

Autant que les marxistes, vous n’avez rien à proposer de mieux à la démocratie capitaliste, votre affaire est de l’utopie avec un fard d’humanisme et ne consiste qu’à japper contre le libéralisme, capitalisme, propriété privées, mondialisation, concurrence, démocratie parlementaire, responsabilité, libre choix… Dans les pays où ça n’existe pas, c’est un régime totalitaire qui est en place.

Anonyme a dit…

C'est être très naïf de penser qu'acheter c'est voter. Ce n'est pas le consommateur qui commande la production mais le producteur qui orchestre le désir de consommation. Et l'utopisme que tu dénigre, c'est à mon point de vue la seule façon digne et courageuse d'envisager l'avenir du monde. Viser au plus bas du "démocratique" , n'être pas capable de même souhaiter une reprise en main de son destin par les exploités (c'est à dire la mojorité), c'est être impuissant.

Alex

Louis Douglas a dit…

Pourtant, là où ya pas de capitalisme, ya pas de démocratie. Et oui la demande existe et il faut en tenir compte, si le produit est poche le monde ne l'achètera pas.

Ya pas mal plus d'exploités dans le style de société marxiste que vous préconisez. Il serait temps d'arrêter de faire le ti-coco.

BlackBloc a dit…

Vla le créditiste qui nous parle d'utopie maintenant. Bien bonne la blague. Qui as-t'il de plus utopiste que le christianisme et son adoration d'un royaume des cieux inexistant?

"You will eat, by and by
In that glorious land above the sky
Work and pray, live on hay
You'll get pie in the sky when you die"

Louis Douglas a dit…

Lorsqu'on essaie de quoi plusieurs fois et qu'à chaque fois ça engendre un État totalitaire, tout en continuant à dire que c'est mieux que la démocratie capitaliste, là ya un gros problème.