vendredi 22 octobre 2010

Pendant ce temps en France...


Le mouvement social, que dis-je la grève générale larvée, se poursuit en France. Nos camarades d'Alternative libertaire produisent une synthèse quotidienne des évènements. Voici ce qu'ils écrivent en ce vendredi, avec quelques éléments d'analyse, à la veille d'un long congé. Si tout va bien, nous aurons une entrevue avec un porte-parole de cette organisation française lors de l'émission de radio de mercredi prochain.

La photo est tirée d'une superbe galerie de photo de presse du mouvement.




Synthèse et éléments de perspectives au 22 octobre

GREVES

> Les grèves reconductibles continuent dans plusieurs secteurs en pointe de la lutte, pétrochimie et rail en particulier. Pour le rail le nombre de grévistes tourne ce vendredi autour des 20% selon les structures syndicales. Les AG de vendredi reconduisent les grèves jusqu’à lundi, l’objectif étant maintenant de tenir jusqu’au jeudi 28. Il semble possible que dans le rail les modalités d’actions évoluent la semaine prochaine.
> De nombreuses grèves ont moins d’écho nationale en tant que telles, en particulier parce que le cœur médiatique de la lutte cette semaine a concerner la question de « l’essence ». Ainsi, la grève se développe dans les collectivités territoriales ou aux impôts, aussi bien que dans de nombreuses boîtes du privé.
> Pour autant il faut noter la difficulté à élargir la grève à de nouveaux secteurs. Les vacances d’automne font que le personnel de l’éducation nationale est « hors jeu » pour la grève pendant 10 jours, mais peu, pour la frange militante, participer aux différentes actions et préparer la mobilisation dans ce secteur pour la rentrée.
> Le mouvement contre la casse des retraites est très particulier. Un noyau dur de grévistes en reconductible est appuyé par des beaucoup de grèves ponctuelles, d’heures de débrayage dans le privé, des blocages et des actions.

BLOCAGES et ACTIONS :
> L’idée de multiplier les actions et les blocages de l’économie c’est fortement développée ces derniers jours. Ces actions/blocages cibles principalement : le renforcement de piquets de grèves, le blocage des transports (routiers, ferroviaires, ports), le blocage de zones industriels, de secteurs spécifiques (par exemples les MIN, marchés d’intérêts nationaux). S’y ajoute également des actions symboliques (banderoles et collages d’affiches, investissements de sièges du MEDEF, de venues de ministres…)
> Les actions de blocages continuent de gagner en intensité. Certaines régions, comme en Bretagne Sud (Quimperlé, Lorient…), ont fait l’objet ce vendredi d’actions concertées et multiples empêchant une intervention policière sur chaque point.
> La semaine a été marquée par les déblocages policiers ordonnés par l’Etat de nombreux dépôts pétroliers, ce qui n’empêche pas à certains endroit de continuer à distance les blocages, sur les voie d’accès à ces dépôts.

UNIVERSITÉS
Le mouvement prend de l’ampleur dans les Université. En une semaine ce sont plus d’un vingtaine qui ont été touché par des piquets de grève (19 en grève vendredi selon SUD Etudiant). A quelques exceptions prêts, liées à des assemblées générales confuse (Rennes II, Le Mirail), le mouvement semble bien s’enraciner. Reste à voir si les étudiant-e-s vont se mobiliser dans la durée de façon massive et réussir à se coordonner (première coordination nationale étudiante prévue ce week-end). Très peu d’universités sont concernées par les vacances. UN appel de l’UNEF (qui ne pèse en réalité pas grand chose) à des mobilisation pendant les vacances est sorti aujourd’hui.

LYCEES
Une frange importante des lycéen-ne-s a rejoint la mobilisation en milieu de semaine dernière. A l’heure actuelle, il est difficile de voir si les vacances d’automne vont avoir un effet mobilisateur ou non. Cela dépend pour beaucoup de l’évolution du mouvement de façon plus générale, ainsi que d’un mouvement plus fort chez les personnels. A noter que les lycéen-ne-s sont particulièrement ciblée dans la répression actuelle contre le mouvement.

(AUTO-)ORGANISATION DU MOUVEMENT
La question de l’organisation du mouvement est complexe. L’auto-organisation, par comité de grève n’est que peu répandue. Par contre les assemblées générales souveraines sont la base du mouvement de grève. La question de l’auto-organisation, du dépassement des structures syndicales dépend surtout des secteurs et des des cultures militantes. A part au niveau étudiant, aucune coordination de secteurs en luttes n’est envisagé au niveau nationale. Il existe de nombreuses réunions interprofessionnelles à l’échelle locale et parfois départementale.

A côté, les rapports intersyndicaux sont vraiment variables suivant les secteurs et les échelles géographiques. Difficile de tirer des généralités, ce qui reste certain c’est que la bonne entente intersyndicale entre structures de luttes ne s’invente pas dans le mouvement mais est issue de rapports de confiances tissés dans le temps. Ainsi sur un même territoire de fortes luttes, tel que Marseille, plusieurs OS agissent en parallèle mais sans union ou concertation.

La question sous-jacente, si le mouvement continue de prendre de l’ampleur, c’est l’articulation entre AG interpro/comités de lutte et intersyndicales (locales, départementale, nationale), du point de vu de la légitimité.

POSITIONS SYNDICALES
La dernière intersyndicale nationale s’est réunie jeudi 21 octobre. Il en sort un nouvel appel, relativement « mou » auquel s’ajoute une journée de grève, le jeudi 28 octobre, et une journée de mobilisation, le samedi 6 novembre. FO et Solidaires n’ont pas signer l’appel, disponible sur les sites internets des structures syndicales. La CNT ne participe pas à ces intersyndicales nationales. Qu’en retenir ? Comment comprendre cette intersyndicale qui n’apporte pas son soutien au mouvement de blocage ?
> Volonté de la CGT de maintenir l’unité de l’intersyndicale et d’y garder la CFDT et l’UNSA, quitte à affaiblir la mobilisation actuelle.
> Volonté des syndicats les plus réformistes de ralentir la mobilisation voir de stopper le mouvement une fois le texte voté au Sénat.
> Faible poids du syndicalisme de lutte.

Il est clair que ces dates sont actuellement, pour les personnes les plus mobilisées, une régression par rapport au rythme adopté depuis le 12 octobre. A nous d’éviter l’enterrement de première classe que nous réserve les directions confédérales.

L’enjeu de la pérennité du mouvement et de sa victoire se porte maintenant sur les secteurs en luttes, les intersyndicales et AG interpro locales et départementales : il faut multiplier les actions et réussir à ce que d’autres secteurs partent en grève pour maintenir le niveau actuel de rapport de force. Le début de la semaine prochaine sera de ce point de vue déterminant.

POSITION DU GOUVERNEMENT ET DU PATRONAT :
Gouvernement L’Etat attaque le mouvement sur trois fronts :
> une action et un discours « anti-blocage ».
> la répression de la jeunesse ( plus de 2400 arrestations à ce jours) qu’accompagne un discours « anti-casseurs » (terme d’amalgame simpliste repris de façon aussi simpliste dans les médias…).
> un discours sur « la France qui travaille » (sic !) et « la France qui veut partir en vacances, pris en otage » (re-sic !).

L’Etat a choisi un affrontement direct avec les grévistes en choisissant de débloquer les dépôts de pétroles et d’utiliser l’argument de « sécurité nationale » pour réquisitionner des ouvriers du privé. Les raffineries sont devenus des enjeux symboliques. Pour autant, vendredi soir, le tribunal de Melun a annulé sur une base d’illégalité, suite au recours en référé syndical, la réquisition des salariés de Grandpuits.

En guerre contre les blocages, qui montrent chaque jours de plus en plus leur efficacité, le gouvernement entretien allégrement une confusion terminologique (bloqueur / casseurs / prise en otage) et tente une offensive qui ne semble pour le moment pas payante vers « l’opinion ».

Ce qui est certain, c’est que de nombreuses personnes ont été arrêté, et les premières peine de prison ferme sont tombées (comparutions immédiates). Au delà du discours sécuritaire et de la répression concrète, de partout remontent les violences policières envers des manifestant-e-s, des lycéen-ne-s, des syndicalistes.

Par ailleurs, force est de constater deux erreurs de communications majeurs du gouvernement sur la question du pétrole. Après avoir dénié toute pénurie, le pouvoir a parlé d’un retour à la normale d’ici à samedi ou dimanche. A l’heure actuelle, cela semble bien improbable. Soit il s’agit de discours influencés par des technocrates très éloignés des réalités, soit il s’agit d’une communication agressive visant à « rassurer » sur sa capacité d’action. Les deux sont possibles. Dans tous les cas la « faiblesse » de l’Etat apparaît au grand jour.

A noter : le début de l’organisation de la bourgeoisie « anti-grève ». On peut s’attendre à l’organisation de pétitions et autres manifestations de droites.

Au niveau du MEDEF : discours geignard sur les répercussions des blocages en prenant la défense des PME. Le patronat se fait tout de même relativement discret. La pression commence à monter de la part des entreprises touchées qui mettent dans la balance une réforme des retraites idéologiques face à des conséquences très concrètes et actuelles des grèves et blocages. Touché là où ça lui fait mal, au porte monnaie, on peut s’attendre à des réactions croissantes et des prises de positions publiques du patronat, notamment au « nom de la préservation de l’emploi ».

« OPINION » Malgré la gesticulation présidentielle et gouvernementale, « l’opinion » semble toujours soutenir majoritairement le mouvement. Cela se sent dans les villes par le soutien direct apportés par les gens, par le succès des caisses de grèves. Les médias véhiculent des sondages indiquant que 3/4 des gens soutiennent le mouvement et près de 60% soutienne l’idée d’un mouvement qui durerait au-delà du vote de la loi au Sénat. Par ailleurs, les populations qui défendent avant tout la réforme sont… les retraités ! Le vieillissement de la population semble renforcer le camps réactionnaire (ce que l’on observe depuis quelques années). Pour autant, les jeunes et les travailleuses et travailleurs soutiennent très massivement la lutte.

« BOITE A IDEES »
Quelques idées qui circulent et qui peuvent servir, si adaptable localement, à renforcer le mouvement :

> avoir un « tract-synthèse » sur la grève, expression des AG interpro locales ou départementales (exemple : le bulletin du Havre)
> Mettre en avant dans les villes, voir dans les quartiers, un espace de rencontre quotidien et à heure fixe. Ce peut être autour d’un lieu de grève, d’une bourse du travail,. L’objectif est de créer un espace d’échange et d’information, indispensable pour mener une lutte sur le long terme.

Synthèse pour l’Alsace :
Alternative libertaire Alsace fait une synthèse quotidienne sur l’Etat du mouvement dans cette région. voir http://alsace.alternativelibertaire.org/

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