Le triomphe de l'abstention
Le fait marquant des élections municipales à Québec ne fait pas la manchette. Pourtant, il n'est pas anodin que seule une minorité de gens soit allée voter (46%). «L'abstention à 54%», on est pas près de voir ça en «une» des quotidiens!
Que comprendre de la chute de 6 points du taux de participation? Aliénation politique de la majorité? Indifférence pour la chose publique? Cynisme collectif? Désintérêt massif? Toutes ces réponses! Et aussi, tout simplement, le fait que ni la campagne électorale, ni les candidat-e-s n'ont donnés de bonnes raisons de se déplacer à l'électorat. À part quelques exceptions, la plupart des protagonistes s'entendaient sur l'essentiel. Alors pourquoi se donner la peine d'aller voter?
Victoire de la pensée positive
Contrairement à ce que certain-e-s semblent penser, la victoire de Régis Labeaume n'est pas une catastrophe nationale. Concrètement. il n'est ni plus à droite, ni plus à gauche, que la candidate défaite du RMQ. C'est un politicien centriste, penchant tantôt à gauche, tantôt à droite (selon l'enjeu), dans la lignée d'un L'Allier (ou d'un Legault au provincial). Comme le soulignent les chroniqueurs du Soleil ce matin (Bourque et Lavoie), si Régis Labeaume a profité de l'appui du courant populiste de Québec, il ne leur doit rien. En fait, Labeaume se démarque de ce courant avec un style très «pensée positive»... S'il faut absolument trouver des filiations au nouveau maire, c'est plus du côté social-libéral qu'il faut chercher (d'ailleurs, il a commencé au P.Q. dans les années 1980 et a d'abord tenté de succéder à L'Allier à la tête du RMQ).
L'échec de la gauche caviard
Bien plus que le triomphe de Régis Labeaume, l'élection fut l'échec de la stratégie de la gauche caviard. Il est clair que les stratèges du RMQ ont tenté de se réinventer et on échoué. Ann Bourget a mené une campagne de droite en tentant de se faire oublier et de faire oublier son parti. Alors qu'elle et le RMQ sont associée à la gauche caviard, on a tenté de nous la présenter comme une sorte de Mario Dumont féminin qui voulait «gérer la ville comme une business» et dont le grand projet était le développement du sport amateur. Durant toute la campagne, la chef du RMQ a évité comme la peste tout ce qui pouvait la faire passer de près ou de loin pour une gauchiste (ex.: tramway, écologie, logement social). Ça a presque marché, jusqu'à ce que Labeaume réussisse à fédérer tous les anti-RMQ. Malheureusement pour Bourget, les gains à droite ont tous été compensés par des pertes à gauche. Au final, le résultat en pourcentage est identique à celui de l'élection de 2005, à cette différence près qu'il est un peu mieux réparti sur l'ensemble du territoire. La campagne de centre-droit du RMQ n'a réussi qu'à démobiliser la base d'un parti qui s'est toujours positionné au centre-gauche. Comme quoi il y a des limites aux possibilités du marketing politique...
Orphelins
À part Légaré (le roi de la patate), les principaux candidat-e-s «sérieux» ont tous patiné au centre de la patinoire durant la campagne électorale. Les différences entre les uns et les autres tenaient à quelques nuances et à des traits de personnalité (en fait, trois des cinq meneurs étaient issus de la même filière socialo-péquiste). Tant la droite populiste que la gauche sociale se sont donc retrouvés orphelins durant cette élection. Dans le cas de la droite, elle s'est divisée entre plusieurs candidat-e-s (même le RMQ a été investi par des adéquistes qui ont obtenu la direction de la campagne!). Dans le cas de la gauche, elle a été également boudée par à peu près tout le monde (sauf peut-être Claude Larose qui vit décidément à une autre époque!).
Pour les libertaires, cette campagne est finalement le reflet de l'absence à peu près complète de mouvements sociaux combatifs, enracinés localement et capable de peser sur la scène politique. C'est aussi un peu le reflet de notre incapacité d'offrir une alternative à la politique politicienne. On peut se consoler avec la forte abstention mais cela ne doit pas masquer le fait que, pour l'instant (?), c'est plus le reflet d'une apathie que d'une rupture...
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