mardi 7 octobre 2008

Liberté vous dites?

Comme vous le savez, en fin de semaine avait lieu l'action liberticide à tendance obscurantiste des chrétiens dans notre ville. Ils/elles ont le culot d'appeler ça "la chaîne pour la vie".

Et bien, nous y étions et voici la réaction d'un des obscurantistes qui parlaient à leur ami imaginaire depuis le milieu du boulevard Laurier (publié dans le Devoir).

Dimanche, j'ai participé à Québec à une petite manifestation pro-vie, contre l'avortement. Nous étions une vingtaine à nous tenir en silence, pancarte à la main, sur le terre-plein entre la Place Laurier et le CHUL. Il y avait aussi des contre-manifestants, plus nombreux, plus bruyants et regroupés autour de drapeaux anarchistes.
Plusieurs d'entre eux ont entrepris de venir nous rejoindre sur le terre-plein afin de nous provoquer et de tourner en dérision notre message de vie. Un geste en particulier m'a frappé: certains se plaçaient avec leur propre pancarte directement devant nous pour cacher aux automobilistes le message que nous voulions communiquer.

Sauf erreur de ma part, les anarchistes sont en faveur de la liberté absolue, ce qui inclut bien sûr la liberté d'expression. En obstruant volontairement la vue d'une pancarte véhiculant une opinion contraire à la leur, n'agissent-ils pas en négateurs de cette liberté qu'ils réclament pourtant si bruyamment? Ne contredisent-ils pas ainsi le principe fondamental de leur position idéologique? Ne font-ils pas eux-mêmes acte de censure et de répression?
Yves Randon, Cap Rouge

Non mais, pauvre petit chrétien. N'empêche que son texte touche à la liberté de touTEs et chacunEs et que nous allons répondre.

Ils se demande, avec un respect soudain et inusité envers les anarchistes, comment nous avons pu manquer de respect au point de cacher leur message anti-choix? Il va même jusqu'à dire que nous avons fait "acte de censure et de répression". Franchement, il y en a qui n'ont pas peur du ridicule.

Tout d'abord, comprenons nous. Nous ne pouvons laisser les libertés des femmes être menacées par une soit disant liberté d'expression d'une petite clique réactionnaire qui met de l'avant qu'un petit tas de cellules a plus de droits que la femme enceinte. À ce titre, à chaque fois qu'un homme égare du sperme, peu importe comment, il tue des millions d'humains en devenir. Autant dire aussi qu'une femme qui refuse de se faire féconder lors de l'ovulation est une meurtrière en puissance. C'est pas là un point de vue religieux au fond? Où sont les libertés là-dedans monsieur Randon?

Continuons dans le registre des libertés soudainement si cher aux anti-choix. Historiquement, la preuve a été faite que peu de chose a autant de pouvoir liberticide que la religion (croisades, exactions répétées faites aux femmes et aux homosexuelLEs, etc.). En tant qu'anarchistes, nous était-il possible de se dire "laissons-les menacer les libertés chèrement acquises au nom de la liberté"? Et par "chèrement acquises", on doit comprendre qu'elles ont été difficilement gagnées face à des autorités religieuses, encore une fois, liberticides. Bref, on retourne encore à la question de base: Doit-on laisser les libertés des femmes être menacées par des religieux/euses ou bien réagir? La réponse a été donnée en fin de semaine.

Finalement, faisons un petit exercice bien triste au fond. Imaginez la situation inverse: les anti-choix contrôleraient encore la vie politique et sociale et quelques militantEs pro-choix auraient été sur le terre-plein du Boulevard Laurier. Devinez la suite. Si vous n'y arrivez pas, demandez au docteur Henry Morgentaler ce qui s'est produit.

Sur ce, monsieur Randon et autres clowns de ce genre, lisez autre chose que la bible afin de vous ôter la crasse qui vous obstrue le jugement.

4 commentaires:

BlackBloc a dit…

Vous êtes intolérants car vous ne tolérez pas mon intolérance. Nyah nyah nyah. :P

Anonyme a dit…

Ahahahah beau message pour ce bonhomme. Il et toute sa gang peuvent bien s'attendre à être bloqué(e)s chaque fois qu'ils et elles voudront faire leur propagande réactionnaire.

Anonyme a dit…

Je trouve étrange de ne trouver nulle part réflexion plus approfondie sur le pouvoir, l'utilisation du pouvoir politique en vue d'une bataille politique. Il est vrai que les anarchistes n'ont pas pour le moment les forces nécessaires pour se poser les questions qui dépassent les cadres de l'État, mais peut-être la question se posera t'elle un jour : qu'est-ce qu'un pouvoir libertaire, qu'est-ce qu'une force politique moins répressive que la démocratie libérale ?

On ne peut pas poser la question de la révolution sans poser la question de la violence, de son usage et de ses limites, cela semble évident. Enfin.



Les anarchistes ont EFFECTIVEMENT combattu pour la liberté d'expression , la liberté d'expression de l'ennemi étant évidemment reconnue (la phrase de référence pourrait être : "If you believe in freedom of speech, you believe in freedom of speech for views you don't like." utilisée par Noam Chomsky en défense d'un écrivain nazi qui se faisait poursuivre par la cour européenne pour avoir publié un livre qui niait l'existence des camps de concentration et d'extermination allemands). Les anarchistes sont allés très loin, beaucoup plus loin que n'importe qui, pour défendre la liberté.

Ils ont tout aussi bien brûlé des églises, posé des bombes, formé des régiments armés de mitraillettes, tué au couteau, tenu des pancartes devant des pro-vie... Les anarchistes sont allés très loin, peut-être pas aussi loin que beaucoup d'autres gens mais quand même, pour s'attaquer aux structures du pouvoir.

Selon moi, et on me corrigera si je me trompe, il y a une différence marquée entre un État qui interdit l'avortement, et un petit groupe de religieux qui expriment un désir de retour à cet état des choses. Le premier est armé et contrôle matériellement le corps des femmes, les seconds sont bien inoffensifs...

Chaque chose ayant son poids et sa mesure, et le mouvement pro-vie ayant été si affaibli par les féministes, il parait normal pour des anarchistes de laisser chacunE s'exprimer (personne n'a empêché la manifestation de se tenir), mais en soulignant "bruyamment" l'aspect liberticide des propositions pro-vie. Cela peut impliquer d'obstruer une pancarte avec une autre pour un moment; le moment que le débat se fasse, le moment que le rapport de force se réalise. Ceci n'est pas de la "censure" (rien n'a été effacé), ni de la répression (aucune violence sauf à l'encontre d'une pancarte... ?) Rien qui va contre la liberté, donc.

Il en aurait été tout autrement, évidemment, si les pro-vie étaient une menace matérielle; si ils empêchaient physiquement ou par menace, des avortements, comme en France. J'espère que monsieur Randon se le tient pour dit.

Mais fort heureusement, nous n'en sommes pas là, ayant réussi à abattre cet aspect de la société traditionnelle. Et faire marche arrière est un effort immense pour la société, presque autant que faire marche avant, alors nous sommes tranquille pour un moment.

J'aimerais savoir cependant ce que sont les perspectives des anarchistes de Québec sur l'avenir des luttes à mener sur le rapport du corps à la science, dans une perspective de liberté. Car à force de mener des combats d'arrière-garde (l'avortement, ça fait quand même longtemps que c'est passé, même les partis politiques de gauche sont d'accord; même les raéliens sont d'accord; même ma grand-mère est d'accord...!), on fini par oublier les perspectives révolutionnaires, et l'attaque à l'avant-garde devrait rester la meilleur défense dans ce genre de débat...

Nicolas a dit…

Cher anonyme (le deuxième), je pense que tu pose des questions qui dépassent largement le cadre forcément restreint des commentaires d'un blogue. Je pense que le mieux serait sans doute de transférer cette discussion sur le forum ABC (dans la bande de droite de notre page principale).

Brièvement, je pense que la menace posée par les pro-vies est relative. Dans l'immédiat, ils ne posent pas une menace physique. Faire des prières devant un hôpital n'est pas très menaçant. Par contre, ça reste de l'intimidation.

Là où le bat blesse, et c'est pour ça qu'on était là, c'est au niveau politique. À ce chapitre, la menace, bien qu'insidieuse, est réelle. Il y a une offensive concertée des forces réactionnaires sur les enjeux d'ordre «moraux» (avortement, enseignement religieux à l'école, mariage gay). L'offensive est si spectaculaire qu'on en oublie souvent que ces forces ne représentent qu'une infime minorité de la population dont l'influence est disproportionnée en raison, notamment, de leur activisme débridé. Le danger c'est lorsque ces forces rencontrent un courant d'opinion populiste comme ce fut le cas aux USA et au Canada anglais (et comme cela pourrait l'être au Québec).

Actuellement, nous n'avons pas les moyens d'être franchement à l'offensive. Notre priorité, pour le moment, est de stopper la droite populiste. Il y a plusieurs manières possible de le faire. Dans l'immédiat nous tentons de relever la tête, de prendre des initiatives et d'occuper le terrain. Il s'agit de constituer, dans la résistance, un pôle alternatif.