mardi 19 avril 2011

La démocratie c'est quoi déjà?

En cette période d'érections pré-copulatoire dans l'urne, des gens généralement propres sur eux-mêmes vous invitent à voter. Partant des bonnes intentions qui pavent le chemin vers l'enfer, le principe consiste généralement à culpabiliser les gens qui ne votent pas et à vous faire croire que vous avez un pouvoir sur les décisions que prendront le Canada dans les prochaines années.

Mais ce n'est pas si simple: il existe plusieurs façons de voter. On a le choix en masse en masse!

  • Le vote pince-nez: voter pour le moins pire.
  • Le vote stratégique: voter pour le candidat qui a le plus grand risque de détrôner le parti que vous ne souhaitez pas voir gagner.
  • Le vote optimiste: voter pour le meilleur candidat.
  • Le vote analphabète: voter pour celui qui à la meilleure pancarte.
  • Le vote bleu: voter pour celui qui a déjà porté un chandail aux couleurs des nordiques.
Pris entre toutes ces judicieuses options, l'électeur moyen se trouve pris de vigoureuses constipations. "Que faire?", s'écrit-il, bouleversé, les jambes flageolantes tel l'incontinent dans la file d'attente des toilettes.

Ces choix laissent entendre que vous avez la liberté de choisir. "La démocratie c'est ça", disent les bien-pensants. On entend même plusieurs dire "si tu votes pas, tu ne peux pas chialer après".

Ha oui?

Regardons y de plus prêt... Selon Wiktionary, la démocratie est un "Régime politique dans lequel l’ensemble du peuple dispose du pouvoir souverain." Le mot vient du grec dêmos « bourgade, peuple » et krátos « corps politique », « gouvernement ».

Eh bin! Suivant cette définition, pouvons-nous affirmer, sans s'étrangler s'il-vous-plait, que nous possédons le pouvoir souverain?
"La démocratie requiert une classe d'élite pour s'occuper de la prise de décisions et "fabriquer" l'assentiment de l'ensemble de la population envers des politiques qui sont supposées dépasser ce qu'elle est capable de développer et de décider par elle-même"
- Noam Chomsky, Comprendre le pouvoir : tome I, Aden, 2005, p. 68.
Déjà avec Chomsky on s'approche plus de quelque chose comme la réalité. Pour pouvoir parler de vraie démocratie, il faut déjà que les conditions soient sur la table. Du genre:
  • La prise de décision ne devrait pas être accaparée par une élite.  
  • Les mandataires devraient être libre des puissants intérêts financiers.
  • Quiconque exerçant une charge pourrait être démis de ses fonctions en tout temps.
  • Les citoyens devraient être bien informés (C'est loin d'être donné, d'ailleurs, bonjour Sun TV News!).
Ça n'a rien d'utopique: Nous entretenons toutes et tous des relations égalitaires avec nos amis, nos voisins ou notre conjointE. Pourquoi n'en serait-il pas de même en politique?

Autogestion et démocratie directe
Pour que le "pouvoir souverain" soit vraiment détenu par la plèbe, il faudrait qu'on s'intéresse davantage à l'autogestion. Ses postulats sont :
  • la suppression de toute distinction entre dirigeants et dirigés,
  • la transparence et la légitimité des décisions,
  • la non appropriation par certains des richesses produites par la collectivité,
  • l'affirmation de l'aptitude des humains à s'organiser sans dirigeant.
D'ici la, continuez à vous tortiller le bulletin dans l'urne.

18 commentaires:

Mon Nom est Personne a dit…

Votez pour personne et faites entrez les Conservateurs majoritaire au Parlement...

Sans cesser de se désoler face à la morosité politique ambiante, il est tout de même dommage que, par un appel à l'annulation ou la non-participation, on ouvre toute grande la porte au parti qui, de toutes les options présentement au ballotage, soit le plus éloigné des valeurs du milieu social et communautaire québécois.

Il me semble que les défenseurs des politiques sociales auraient un contexte plus favorable pour changer les choses si le NPD, le Bloc, les Verts ou les Libéraux étaient plus présents à la Chambre des communes, non?

Cela, en attendant de pouvoir proposer autre chose (autre système, autres partis, autre pays, ou je ne sais trop).

Nicolas a dit…

Ah la la, ce qu'ils peuvent être distraits les électeurs! Ce sont évidemment les gens qui votent qui vont faire rentrer les conservateurs minoritaires ou majoritaires, pas ceux qui ne votent pas. Faut toujours tout expliquer!

Mon Nom est Personne a dit…

Si les affinités des gens qui ne votent pas tendent idéologiquement vers le NPD, les Bloc, les Libéraux ou les Verts, on peut s'imaginer que, par l'absence de leur voix, ils donnent plus de poid à celle de ceux qui votent Conservateur.

Quand les élections se décident par des marges plus restreintes (comme dans certains secteurs ici et ailleurs), on peut s'imaginer que toute voix progressiste peut être utile pour créer un climat peut-être plus réceptif aux Communes.

Ne pas voter ou annuler son vote, oui, c'est protester contre le système, mais c'est aussi entériner une majorité qui risque bien, actuellement, de voter Conservateur et donc appuyer, au final, la présence d'un gouvernement conservateur majoritaire.

Et, j'en suis certain, dans un contexte conservateur majoritaire, la rue risque d'être pas mal moins écoutée qu'elle ne l'était déjà.

Nicolas a dit…

Même si tous les anarchistes de la région de Québec allaient voter le 2 mai, ça ne changerait rien à l'issu du vote, même dans les circonscriptions contestées. On ne se contera pas d'histoire, l'abstentionnisme politique est un courant marginal qui n'a pas (encore) d'influence politique majeure. Nous ne sommes pas la CNT des années 1930 qui pouvait faire la différence entre l'élection d'un gouvernement de gauche ou de droite simplement en appelant, ou pas, à l'abstention active.

De toute façon, on s'énerve bien gros le poil des jambes avec l'élection mais ça change quoi? Franchement, c'est bien plus le reflet de tendances de fond. On n'enrayera pas la droite populiste dans la région de Québec en allant voter. Ça va prendre un peu plus d'action que ça.

David Gendron a dit…

La seule option intéressante pour un anarchiste est de voter pour le Bloc!

Sinon, restez chez vous!

David Gendron a dit…

"On n'enrayera pas la droite populiste dans la région de Québec en allant voter. Ça va prendre un peu plus d'action que ça."

Ça on le sait!

Nicolas a dit…

Votez pour le Bloc, parce qu'on veut que les contrats des F35 profitent au Quebec!

Mon Nom est Personne a dit…

Aller voter est la première action qui pourra amorcer une diminution de l'influence de la droite populiste à Québec.

L'idée c'est de ne pas SEULEMENT aller voter et dire que la démocratie se termine là. On vote. Puis on fait autre chose.

Mais, en ne votant pas, on continue aussi la marginalisation de la gauche à Québec.

Francois a dit…

Bin pour une fois qu'il y a un débat intéressant dans la section commentaire, je suis content que ce soit suite à un de mes articles :)

Les arguments de M. Personne sont très bons. Par contre, un argument important n'a pas été mentionné: Voter, c'est légitimer le cirque démocratique. C'est comme de dire "Le système électoral préhistorique à la canadienne c'est de la marde, mais je n'ai d'autres choix. Je dois voter".

Ça revient à dire "je suis une poire, j'en suis conscient, je l'assume et en plus je met le bulletin dans une urne pour le prouver".

Ça revient à se ridiculiser. À jouer le premier rôle dans un dîner de cons.

Si le système électoral n'est pas démocratique, il faut le dénoncer. Pas y participer.

BlackBloc a dit…

>>Si les affinités des gens qui ne votent pas tendent idéologiquement vers le NPD, les Bloc, les Libéraux ou les Verts, on peut s'imaginer que, par l'absence de leur voix, ils donnent plus de poid à celle de ceux qui votent Conservateur.

Mais on ne tend pas idéologiquement vers le NPD, et encore moins vers le Bloc, les Libéraux (!) ou les Verts. On n'est anarchistes, pas sociaux-démocrates (NPD), nationalistes (Bloc), libéraux (PLC) ou idéologiquement confus (Verts).

Alors ya pas de soucis! Cependant le parti Anarchiste non-existent regrette amèrement de ne pas recevoir nos voix.

Anonyme a dit…

"De toute façon, on s'énerve bien gros le poil des jambes avec l'élection mais ça change quoi?"

C'est déjà s'énerver le poil que de faire campagne pour l'abstension.

De toute façon l'ULC se contredit toutes les 2 secondes là dessus. En appuyant des politiques de gauche comme le logement social etc. Tiens, juste une de vos affiches :
"N'attendons rien de l'État... faisons reculer le gouvernement."

On attend déjà de lui qu'il recule...
On aura pas mal plus de misère à faire reculer le gouvernement si l'État se retrouve aux mains des conservateurs.

Mais ça dépend de ce que vous voulez (si toutefois vous le savez). Voulez vous des politiques anti-sociales qui forcent la gauche à se radicaliser, ou des politiques "de gauche" qui profitent à court terme aux plus démunis?

Marc L a dit…

En fait, j'imagine que c'est une question de cohérence : on ne peut pas dénoncer le système d'un côté, puis sortir dans la rue pour aller demander à ce même système de créer plus de logements sociaux ou de maintenir certaines avancées sociales (comme l'avortement, par exemple).

Le mouvement anarchiste agit parfois comme un mouvement anarchiste (justement), lorsqu'il y a élection, demandant de rejeter le système et le reste. Mais, dès que l'élection est passée, il sort dans la rue et appuie les organismes qui demande à l'État des améliorations sociales (et qui, probablement, est plus intéressé et concerné par le résultat des élections).

De grâce, si vous ne votez pas, n'allez pas manifestez dans des bureau de député pour les frais de scolarité ou autres dossiers : de toute façon, vous ne voterez pas pour eux, le temps venu, s'il donnent leur OK à vos demandes.

Soyez conséquent : la démocratie, c'est pas seulement lors des élections et, parallèlement, l'anarchie, c'est pas seulement, non plus, autour du vote!

Anonyme a dit…

Ce n'est pas "le mouvement anarchiste" qui fait ça, mais plus spécialement l'UCL, qui en plus donne des leçons. C'est même plutôt dommage que l'anarchisme soit représenté par l'UCL (parce que c'est la seule "organisation" visible). Évidemment, ceux qui ne s'accomodent pas des contradictions de l'UCL sont discalifiés comme anarchistes "life-style" par cette même organisation...

Anonyme a dit…

Je répète ma question, à laquelle je demande à l'UCL de répondre:

Voulez vous des politiques anti-sociales qui forcent la gauche à se radicaliser, ou des politiques "de gauche" qui profitent à court terme aux plus démunis?

Avouez que cette question vous embête... haha

Nicolas a dit…

Faire campagne sur l'abstention, c'est vite dit. On a réuni nos arguments dans un site et mis des posters en pdf. C'est une intervention politique normale sur un sujet d'actualité.

Je ne vois pas trop la contradiction soulevée. Les politiques sociales ne sont jamais sorties des urnes. Dans le meilleurs des cas, les urnes ne sont venue que sanctionner un rapport de force déjà existent. En disant " n'attendons rien de l'état, seule la lutte paie", c'est exactement ce que nous disons.

Qu'est-ce qu'on veut? La révolution sociale et le communisme libertaire. La redistribution de la richesse --que ce soit sous forme de meilleurs salaires ou de logements sociaux-- va dans ce sens général. Sous le capitalisme, il y a lutte de classe. En attendant d'avoir le gâteau au complet, on va se battre pour augmenter notre part!

Oui on veut que les gens se radicalisent. Oui on veut qu'ils aient le moins d'illusions possible sur le système. Non on ne prône pas la politique du pire. Non se faire taper sur la tête ne radicalise pas nécessairement. Quand ça va mal, ça peut aussi bien virer populiste ou facho.

La couleur du gouvernement importe peu sur les politiques sociales. Depuis 30 ans, des gouvernements de toutes les couleurs, y compris NPD, ont coupés dans les politiques sociales (et à l'inverse, la lutte a fait reculer des gouvernements de pas mal toutes les couleurs aussi et même fait faire des gains).

Pour reprendre ton cas du logement social: Chrétien a complété le retrait complet du fédéral annonçé sous Mulroney malgré une promesse contraire. Parizeau a relançé ça, confirmé par Bouchard. Chrétien est revenu dans le décors. Charest a maintenu le programme de l'époque Bouchard et l'a même bonifié. Layton a forcé Martin a en faire plus (et Duceppe a voté contre). Harper a maintenu ce que Layton avait obtenu, il en a même rajouté une couche dans le programme d'infrastructure. Là, Harper coupe complètement et Ignatieff promet de recommencer à en faire. Mais qu'est-ce qui me dit qu'il va pas faire comme Chretien? Et si jamais Layton a la balance du pouvoir, qu'est-ce qui me dit que Duceppe va pas encore essayer de torpiller l'initiative?

Non, vraiment, l'élément clef c'est l'organisation et la mobilisation des locataires. Pas l'élection de politiciens.

Nicolas a dit…

On peut tout à fait dénoncer et rejeter le système et participer aux luttes sociales. En fait, on est même plus légitime que les électeurs pour le faire!

En votant, les gens légitiment le système et y consentent. Théoriquement, l'électeur progressiste reconnait implicitement le droit du vainqueur de gouverner. Donc, il reconnait également son droit, par exemple, de faire des lois. Moi qui ne vote, je n'ai légitimé ni le système, ni n'y ai consenti. Je suis donc tout à fait légitime de contester une décision gouvernementale qui me déplait, et même de revendiquer! Il n'y a pas là de contradiction.

Par ailleurs, nous sommes partisans de la démocratie directe et c'est entre autre parce que le système actuel n'est pas réellement démocratique que nous le rejetons.

P.S. Étant donné les taux de participation, notamment chez les jeunes et dans les classes populaires, il y a de forte chance qu'il y ait plus de gens qui votent pas dans la rue que de gens qui vote. (dans mon quartier, c'est environ 55% des gens qui ne sont pas allé voter à la dernière élection fédérale).

Nicolas a dit…

Au lieu de se plaindre et de trouver "dommage" la diffusion de nos idées communistes libertaires, les anarchistes dissidents devraient tout simplement s'organiser et faire ce qu'il faut pour être visibles eux-aussi. Si leurs idées sont meilleures, ça ne devrait pas être trop difficile de nous déclasser (surtout que, d'après nos amis dissidents, puisque nous ne sommes pas représentatifs, ils doivent donc être plus nombreux que nous...)

Anonyme a dit…

Tes réponses sont bonnes en effet. Mais si les conservateurs sont réélus ils auront une légitimité pour faire reculer nos droits encore plus radicalement. D'autant plus qu'il y a un vent de droite radicale (décomplexée) de plus en plus évident et que ce genre de politiques est soutenu par des personnalités médiatiques qui prennent de plus en plus de place (Duhaime, Dumont, radio-poubelle etc). C'est bientôt la population elle-même qui va réclamer le retour à la peine de mort et autres saloperies.

Il n'y a pas que des reculs économiques (ceux que font subir aux plus pauvres tous les parti confondus, comme tu le montres bien) mais des reculs idéologiques que seul le parti conservateur ose afficher comme sa marque de commerce.

Je ne dis pas que j'irai voter, je ne l'ai pas fait depuis 10 ans au moins. Mais je commence à m'inquiéter du tour que prend le discours idéologique au Canada et aux USA. C'est pourquoi je pense que je m'abstiendrais d'appeller à l'abstention en ce moment.