dimanche 23 janvier 2011

L’imposture libertarienne dénoncée par les libertaires p.3/4

Le texte qui suit fait partie d'un document sans prétention qui constituerait une modeste analyse de la droite populiste. Vous êtes fortement invités à le commenter dans la section prévue à cet effet. Vos commentaires pourront certainement avoir un impact sur la version finale.Il sera publié en plusieurs morceaux dans les jours qui viennent. Il ne représente que les opinions de l'auteur. 

L’imposture libertarienne dénoncée par les libertaires p.3/4
Table des matières

Leurs modèles
Duplessis
La Bolivie
Le Chili
La Somalie
La défense de l’identité québécoise
Le féminisme c’est dépassé
Discours des classes aisées récupérée par la classe populaire
Sous-représentativité dans les médias
D’autres idées moins avouables

Leurs modèles

Duplessis

Ça fait réfléchir. Quand le RLQ prétend que leur objectif est de faire avancer le Québec, on constate plutôt le contraire. Leur modèle est le Québec des années 1950, quelque chose qui est assumé sans complexe par Frédéric Têtu (L’affaire Maxime Bernier et l’immobilisme québécois, Les Analystes). Une époque bénie ou on s’endettait à chaque consultation chez le médecin et ou on trottait en carrosse sur des chemins de terre pour conduire ses enfants tuberculeux à l’école de rang.


La Bolivie

Les droitistes aimeraient transformer le Québec dans un paradis des entreprises privées un peu comme certains pays du tiers monde. On jurerait que leur exemple est un pays comme... la Bolivie, tiens. La bas, l’État se résume a peu près à la police et l’armée. Normal, a peu près tout le monde étant travailleur autonome, personne ne paie d'impôt. Comment voudriez-vous qu’il y ait des services publics?

Il y a pourtant bel et bien un système de santé d’État en parallèle avec un système privé. Cependant, à moins d’être très pauvre, personne n’approche les hôpitaux publics, de peur d’en sortir plus malade qu’à l’entrée. On parle fréquemment de cas d’enlèvement d’enfants dans ces hôpitaux.

Notez que la Bolivie est le pays le plus pauvre d’Amérique du sud, malgré ses abondantes ressources naturelles (or, étain, pétrole, gaz naturel, lithium etc). Ça n’empêche pas l’existence d’une classe riche qui accapare toute la valeur de ces ressources, main dans la main avec des corporations étrangères. La Bolivie, pays d’une pauvreté économique, démocratique et sociale sans borne, est le paradis des libertariens.


Le Chili

Un autre beau modèle, géographiquement pas très loin, est celui du Chili de Pinochet. Cette fois, c’est Éric Duhaime qui en fait l’apologie sans complexe dans une note économique de mai 2010. Dans ce document, Éric vante la réforme du régime de retraite du ministre libéral José Piñera, entré en fonction pendant la dictature. Notez que ce système a été critiqué pour être discriminatoire à l’égard des travailleurs à bas revenus et des femmes (http://fr.wikipedia.org/wiki/José_Piñera, consulté le 10 décembre 2010).

L’économie Chilienne fut durablement transformée avec l’intervention des Chicago Boys, des économistes instruits aux États-Unis et influencés par les idées néolibérales de Milton Friedman. Ces politiques ont été désastreuses pour le pays mais pas pour tout le monde. Les classes aisées sont vraiment celles qui ont bénéficiées le plus de l'expansion économique. Ainsi, entre 1974 et 1989, les revenus des 10 % des ménages chiliens les plus riches ont augmenté 28 fois plus vite que les 10 % des ménages chiliens les plus pauvres. Dans son bouquin La Stratégie du choc, Naomi Klein reproche aux Chicago Boys d'avoir appliqué leur politique économique grâce à la terreur exercée par le régime, ce qui aurait été impossible dans un régime démocratique.

La Somalie

La Somalie est aussi l’un des modèles des libertariens (http://www.peterleeson.com/Better_Off_Stateless.pdf). Le pays offrirait des prix exceptionnellement bas et un excellent service dans le domaine privé des télécommunications.

Le pays n’a pas de gouvernement depuis la dictature de Siad Barre en 1991. Par contre, une guerre civile sanglante agite le pays depuis 1986. La Somalie est fréquemment bombardée par les États-Unis qui prennent pour cible l’Union des tribunaux islamiques. L’Éthiopie et l’Union africaine interviennent aussi militairement en Somalie. Les attaques désespérées des pirates somaliens ont connus une formidable gloire internationale médiatique, mais passagère, récemment.

Il ne viendrait pas spontanément à l’esprit de quelqu’un de sain d’esprit de considérer la Somalie comme un modèle à suivre. Mais rien n’arrête les libertariens.

On peut remarquer des points communs entre ces différents modèles. L’état est clairement réduit au minimum, alors que l’entreprise privée est aux anges. Leur charge fiscale est minimale. D’un autre côté, l’écart entre riche et pauvre est abyssal et le bilan du bien-être humain est misérable. 

La défense de l’identité québécoise

Plusieurs des participants du RLQ se proclament nationaliste (canadien ou québécois). Jacques Brassard pleure des larmes de crocodiles en voyant le français s'effilocher à Montréal tout en mettant de l’avant un islamophobisme primaire. C’est le nationalisme du drapeau, de la couleur de la peau et de l’imbécile heureux qui est né quelque part. C’est un nationalisme exclusif, qui classe les citoyens en bons et en mauvais québécois.

Les anarchistes sont internationalistes. Tous les êtres humains sont réunis dans une grande fraternité humaine. Les frontières d’État sont des barrières artificielles entre les peuples qui sert à nous diviser.

Par contre, est-ce à dire qu’il faut accepter l’assimilation d’une culture par une autre? Certainement pas. La culture de tous les peuples doit être protégée. Le métissage, encouragé. L’histoire nous a montré que le capitalisme agit comme un rouleau compresseur sur les cultures. Le meilleur exemple est celui des peuples autochtones. Pour maintenir son pouvoir et pour faciliter le commerce, rien de tel que d’avoir un seul peuple dominant, préférablement blanc, parlant une seule langue, idéalement l’anglais. Le reste doit disparaître par la violence ou par l’assimilation culturelle.

Il pourrait être intéressant que l’UCL développe un jour un argumentaire plus développé en ce sens, en réponse à ceux qui offrent une réponse simpliste à cette question, comme le Réseau de Résistance du Québécois (RRQ) par exemple.

Le féminisme c’est dépassé

Nombreuses sont les critiques des droitistes au sujet du féminisme. On dit que la Fédération des Femmes du Québec (FFQ) ne représente qu’une minorité de québécoises. Que l’organisation ne serait qu’une vulgaire branche de Québec Solidaire. Finalement, les femmes ne seraient pas plus victimes de pauvreté, de discrimination, d'oppression et d'exclusion que les hommes.

Éric Caire, nous prouvant malheureusement une fois de plus que le ridicule ne tue pas, qualifie même la FFQ d’être islamiste (http://blogues.canoe.ca/ericduhaime/ideologie/feminisme/les-paleo-feministes)

Nathalie Elgrably-Lévy a publié un texte sur le site de l’Institut Économique de Montréal (IEDM) sur le sujet “Jadis, nos grands-mères étaient financièrement dépendantes de leur mari. Aujourd'hui, la FFQ préconise des mesures pour les rendre dépendantes de l'État. L'émancipation, la vraie, consiste à apprendre à ne dépendre de personne et non à remplacer un pourvoyeur par un autre. L'autonomie consiste à se prendre en charge et non à demander d'être entretenu par la société!” On note la présence de l’argumentaire libertarien traditionnel disant que chaque humain possède les mêmes chances de “devenir quelqu’un”, qu’il ne suffit que de mettre beaucoup d’efforts pour obtenir “du succès” et qui sait, pourquoi pas, devenir président des États-Unis. Les droitistes sont conscients des disparités entre hommes et femmes, mais les femmes en sont les uniques responsables.

Mme Elgrably-Lévy oublie commodément que les femmes touchent 70 % du salaire des hommes. Les femmes occupent entre 60 % et 70 % des emplois au salaire minimum (http://www.ffq.qc.ca/2010/08/pour-une-plus-grande-autonomie-economique-des-femmes). Ce n’est pas un choix personnel, ça. Ce n’est pas la responsabilité individuelle de chaque femme. C’est une conséquence de choix politiques et sociaux d’une société patriarcale.

Remarquez que la prise de position de Mme Elgrably-Lévy est celle du statut quo. Si les femmes ont un statut inférieur aux hommes, c’est qu’elles sont naturellement plus faibles. Une position violemment rejetée par les féministes radicaux et les libertaires.

On prend aussi beaucoup de soins à tenter de discréditer le mouvement. Les porte-paroles féministes ne seraient pas assez attrayantes sexuellement. Elles sont contre la sexualité. En bref, quand on ne peut répondre avec des arguments, on utilise l’attaque personnelle.

Discours des classes aisées récupérée par la classe populaire

Tout les gauchistes connaissent la fameuse citation de Warren Buffett « La guerre des classes existe, c’est un fait, mais c’est la mienne, celle des riches, qui mène cette guerre et nous sommes en train de la remporter ». Il est tout à fait normal que les riches soient conscient de leurs intérêts de classe et les défendent de toute leur force. Le contraire serait bizarre.

Pourtant, avec la “nouvelle droite”, on voit naître toute une fantaisie: La classe populaire s’approprie le discours de la classe riche. Des ouvriers, des mères monoparentales et des étudiants régurgitent le discours du libre marché, de la concurrence avec la Chine et de la hausse des tarifs. Une classe défend l’intérêt de celle qui l’asservit! On parle ici d’aliénation.

Il est particulièrement vivant chez les adeptes de la radio poubelle. Lorsque des citoyens du Québec intra-muros eurent l’audace de se plaindre du bruit généré par l’événement publicitaire Taureau-Rouge-Glace-Brisée, les privant de sommeil pendant des semaines, on vit une autre partie de la ville, la banlieue, prendre le côté de l’entreprise privée. Une compagnie autrichienne multimilliardaire produisant une boisson énergisante dangereuse pour la santé se vit protégée par une meute d’agressifs porteurs de calottes. La vente du sirop se vit stimulé à l’instigation des radios et on vit même le maire brandir, l’écume aux lèvres, une canette en plein conseil de ville. Il fallait défendre coûte que coûte les intérêts purement publicitaires de la corporation au détriment du bien-être des citoyens!

Les exemples abondent. Combien d’employés défendent les mesures les plus condamnables de leurs patrons? Combien de prolétaires réclament une réduction des programmes sociaux? Combien d’étudiants souhaitent la hausse des frais de scolarité? Lorsque l’on défend les intérêts d’une classe qui n’est pas la nôtre, c’est de l’aliénation.

Sous-représentativité dans les médias

La droite se plaint d’être absente dans les médias. Éric Duhaime dénonce régulièrement le “règne de la pensée unique” qui laisserait peu de place pour la droite dans les médias.

Pourtant la droite est présente sur toutes les tribunes, sur tous les supports, dans tous les médias. L’ex chef de l’ADQ anime une émission quotidienne à V qui attire entre 100,000 et 120,000 téléspectateurs (Pour une télé aux couleurs différentes, Rue Frontenac, 25 novembre 2010). Éric Duhaime participe aussi à cette émission, en plus d’être présent à CHOI, le Journal de Québec, le National Post, le Toronto Sun, Canoe etc. On ne peut pas affubler l’épithète de gauche aux populistes Gilles Proulx, André Arthur, Jeff Fillion, Stéphane Dupont, Sylvain Bouchard qui ont aussi des cotes d’écoute très enviables.

Brian Mulroney, ex-premier ministre Conservateur, a dit de son ami Pierre Karl Péladeau, PDG de Quebecor, “Qu’il était un conservateur avec un petit ‘c’”. L’épouse de Paul Desmarais, de Power Corporation et donc de Gesca, est présidente du conseil d’administration de l’Institut Économique de Montréal. Pierre et Paul sont propriétaires de l’essentiel de notre temps d’attention médiatique disponible au Québec par leurs magazines, quotidiens, télés et radios.

En fait de pensée unique, c’est plutôt précisément celle du néolibéralisme qui domine outrageusement le paysage. Tellement qu’on serait bien en peine de trouver une seule émission de gauche à la radio ou à la télé, commerciale ou publique. La seule présence médiatique de la gauche, souvent timide, c’est dans les médias communautaires indépendants qu’on la retrouve.

Au lieu de sous-représentativité, on devrait plutôt parler de sur-représentativité. Si on peut se baser sur les statistiques des intentions de vote, ça serait plutôt la gauche qui rejoindrait le maximum de gens (Le blogue de Jean-François Lisée, La droite québécoise monte! Et si c’était le contraire?, http://www2.lactualite.com/jean-francois-lisee/la-droite-quebecoise-monte-et-si-cetait-le-contraire/6096/).

D’autres idées moins avouables

Notons que les droitistes endossent des idées franchement condamnables, le négationnisme environnemental, l’islamophobie et le retour du religieux. Je ne perdrai pas de temps à décrire ces pans de leur pensée. Ajoutons qu’ils ont une tendance haineuse dans leur mouvement; anti-pauvre, anti-intellectuel, anti-art, anti-cycliste... alouette.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Très beau travail François! Merci.
Je changerais 3-4 mots dans ton texte :

"Les droitistes aimeraient transformer le Québec DANS UN paradis des entreprises privées."

Je dirais plutôt : "...transformer le Québec EN UN paradis des..."

"Pierre et Paul sont propriétaires de L'ESSENTIEL de notre temps d’attention médiatique"

Je dirais plutôt : "...sont propriétaires de la PRESQUE TOTALITÉ de notre..."
Ça me semble plus précis.

À plus
Alex

Francois a dit…

C'est noté!