mercredi 16 septembre 2009

La minute du patrimoine révolutionnaire: La Marseillaise canadienne

La minute du patrimoine est une chronique musicale. L'idée est de faire connaître l'histoire et les dessous de certaines chansons révolutionnaires.

Cette semaine: La Marseillaise canadienne


Via le blogue La Commune de l'UCL-Montréal



La Marseillaise canadienne est à la fois l'un des textes les plus romantiques et… étranges qui soit. Lors d'une manifestation en soutien aux deux députés républicains emprisonnés de Montréal-Ouest, en 1832, la troupe tire sur la foule et fait trois morts (voir la gravure d'époque à gauche). Ces événements seront par la suite connus comme « le massacre du 21 mai ». Des assemblées de protestation sont tenues à Saint-Benoît, à St-Rémy de Napierville, à Chambly, à Saint-Hyacinthe, à L'Assomption, etc., et quelques 5000 personnes de langues et de croyances différentes assistent aux funérailles des martyrs. Une partie d'entre eux entonne « La Marseillaise canadienne ». Alors que la Marseillaise française est à la même époque interdite en France, la version canadienne la dépasse largement en radicalisme. Elle compte même de nombreux appels à l'anarchie au moins 8 ans avant que Proudhon ne fasse usage du terme… soi-disant pour la première fois.

Présence d'anarchisme avant l'heure en terre d'Amérique du nord ? Curieux hasard créé par la magie de la poésie ? À vous de juger, l'auteur nous est encore inconnu, de même que le rayonnement véritable qu'a eu cette chanson à l'époque. La seule chose qu'on sait, c'est que la Marseillaise canadienne sera à nouveau transformée plusieurs années plus tard pour devenir un hommage à Louis Riel, le métis pendu en 1885.

La Marseilaise canadienne (1832)

1.
Allons ! Enfants de la patrie,
Le jour de gloire est arrivé;
D'une trop longue tyrannie

Le sceptre de fer est usé (bis)
Entendez-vous tomber les chaînes
Des deux braves concitoyens ?
Le remords brise leurs liens
Liberté tu nous les ramènes!

Campagnards, citadins,
Formez vos bataillons!
Partons! Marchons!
Qu'un peuple entier
Suive nos pavillons

2.
Voyez quelle pompe s'apprête
Pour célébrer un si grand jour
L'anarchie entière est en fête,
Au souvenir de leur retour (bis)
On part, on, court, on a des ailes
Malgré la rigueur des autants,
Troupeaux de vieilles et d'enfants
Encombrent toutes nos ruelles

Campagnards, citadins,
Formez vos bataillons!
(…)

3.
Venez célébrer leur mémoire,
Grands politiques journaliers!
Mais, de peur de noircir leur gloire,
Débarbouillez-vous, charbonniers (bis)
Cependant, gardez-vous de croire
Qu'on dédaigne vos noirs chariots!
Non! Ils traîneront nos héros
Aussi bien qu'un char de gloire.

Campagnards, citadins,
Formez vos bataillons!
(…)

4.
Vous que de hautes destinées
Tiennent enchaînés sur nos toits,
En ramonant nos cheminées,
Dites, au moins cent et cent fois (bis)
« Vive notre démocratie!
Patriotes cabaretiers,
Vivent ramoneurs, charbonniers
Nobles champions de l'anarchie!»

Campagnards, citadins,
Formez vos bataillons!
(…)

5.
Mais, peuple souverain, silence!
Voici venir tes défenseurs
Fais tonner ta mâle éloquence,
Grêler tes coups de poings vainqueurs (bis)!
Peins la liberté, ses miracles;
Voilà ses martyrs parmi nous
Qu'ils ne pensent plus aux verrous
Et soient sans cesse nos oracles!

Campagnards, citadins,
Formez vos bataillons!
(…)

6.
Enfin le drapeau tricolore
Vient se déployer à nos yeux!
Sur ce sol va-t-il donc encore
En héros transformer des gueux ? (bis)
N'en doutons point! Ce guet-apens,
Qu'il réunisse – il en est temps –
Les vrais enfants de l'anarchie!

Campagnards, citadins,
Formez vos bataillons!
(…)

7. Mais, si notre réjouissance
Signale leur heureux retour,
Notre vive reconnaissance
Leur droit un tribut en ce jour (bis)
Ce n'est point assez des culottes
Dont nous rappellent leurs menottes !

Campagnards, citadins,
Formez vos bataillons!
(…)

8.
Promenez de ville en village
Tracey, Duvernay, Papineau,
Morin, Lafontaine, Bourdage,
Letourneau, Boissonneau,
Mousseau! (bis)
Que de ces grands noms toute bouche
Publie en baillant les hauts faits!
Qu'en leur honneur tous nos mousquets
Fassent péter une cartouche!

Campagnards, citadins,
Formez vos bataillons!

(…)

Si vous désirez lire en entendre d'autres chants révolutionnaires de l'époque, rendez vous à ce site, dans la section sur les patriotes, vous trouverez paroles, musiques et partitions.

2 commentaires:

Nicolas a dit…

J'ai rien vu en tout cas.

Anonyme a dit…

Tracey (Daniel?), Duvernay (Ludger?), Papineau (Louis-Joseph?)
Morin (Achille?, Augustin?, Charles?), Lafontaine (Abraham?, Charles?, Gonzague?), Bourdage (David?)
Létourneau (Jean?, Louis?), Boissonneau (Nicolas?, Pierre?), Mousseau (Alexis?, Hyacinthe?, Louis?)

C'est très clairement un chant Patriote ça. La question n'est pas tant de savoir comment se peut être un chant anarchiste, mais plutôt pourquoi le Parti Patriote faisait des références à l'anarchie comme ça.

La référence dans cette thèse de doctorat http://www.archipel.uqam.ca/1283/1/D1663.pdf (p. 95) laisse entendre que c'était un chant canadien qui s'opposait aux bureaucrates (députés pro-empire britannique). Voir ici pour plus d'info : http://cgi2.cvm.qc.ca/glaporte/1837.pl?out=article&pno=combat26 .

Quelqu'un a des liens avec cette personne : http://www.unites.uqam.ca/arche/alaq/index.php?nomLien=106 ?